L'histoire :
L’américain Charles Bukowski a vécu une « putain d’enfance malheureuse et tourmentée » dans les années 30 américaines. Ses parents émigrés d’Allemagne en 1923 ont une forte tendance mythomane, par jalousie sociale. Son père, surtout, frappe sa mère, et il colle à son fils plusieurs roustes par semaine. Charles doit régulièrement tondre la pelouse et il ne faut pas qu’un seul brin d’herbe dépasse, sinon c’est la raclée. Or il y a toujours un brin d’herbe qui dépasse... A l’adolescence, Bukowski se réfugie dès qu’il le peut dans la lecture, notamment dans les ouvrages de John Fante ou d’Henry Miller. Et puisqu’il a réussi à se faire offrir une machine à écrire, il se met à écrire des poèmes. Il est tellement rongé par l’acné qu’il passe un séjour de 6 mois dans un hôpital pour suivre un traitement. C’est durant cette période de réclusion qu’il prend vraiment goût pour l’écriture. Il prend aussi goût assez jeune pour l’alcool. Dès la deuxième gorgée de vin, il adore ça. Ses mauvaises fréquentations l’incitent aussi à regarder sous la jupe des filles. Baiser des filles est un truc qui l’intrigue, qui l’attire… Mais son alcoolisme et sa sale gueule ne lui donnent guère confiance pour en aborder des jolies. Il quitte le foyer parental lorsque son père découvre ses poèmes. Ce jour-là, c’est lui qui frappe son père et il se casse. Dès lors, il cherche à assurer un minimum de revenus pour s’acheter sa dose d’alcool…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A l’occasion des 30 ans de la disparition du poète et romancier américain Charles Bukowski (le 9 mars 1994), les éditions Petit à Petit proposent cette biographie BD entrecoupée de focus didactiques… à la mode Petit à Petit. Souvenez-vous : Bukowski, c’est cet écrivain alcoolique qui vida plusieurs bouteilles en un quart d’heure sur le plateau de Bernard Pivot dans l’émission Apostrophe (1978) et qui récolta un « Ta gueule Bukowski ! » de la part de François Cavanna, excédé par son attitude irrespectueuse. Il fut néanmoins le parangon d’un mouvement littéraire très explicite, le « réalisme sale », et laisse derrière lui une œuvre poétique et romancière considérable. On découvre dans cette longue biographie précise et immersive scénarisée par Michele Botton, les origines de cet état d’esprit dégueulasse et méprisable, de son sévère nihilisme. Pour un psy, c’est un cas d’école : parents violents, enfance malheureuse, adolescence perturbée, fuite dans la littérature, alcoolisme sévère et jamais sevré. C’est un miracle qu’il ait atteint les 74 ans. En cette ère de wokisme pointilleux, l’éditeur prend aussi soin de préciser en intro la nécessité de replacer dans le contexte tous les propos misogynes et homophobes de l’auteur, qui sont retranscrits dans un souci de véracité et non pour être cautionnés. Au dessin, Letizia Cadonici utilise une griffe semi-réaliste assez brute, plutôt en adéquation avec le genre du personnage, avec une économie de décors, mais des ambiances de couleurs travaillées par des aplats souvent bichromiques (par Francesco Segala).