L'histoire :
En mai 1720, deux tailleurs de pierres s’embrouillent sur un chantier à proximité de la Cannebière sur lequel ils travaillent. En trébuchant, l’un d’entre eux provoque un éboulement. A la stupéfaction des ouvriers, ils découvrent tout un réseau de ruines souterraines, avec un charnier. Sans doute cet entassement de squelettes date-t-il de la grande peste noire ? Les anciens voient dans cet épisode le mauvais œil. Le 22 juillet, un navire de commerce, le Grand-Saint-Antoine revient d’une tournée dans les ports du Proche Orient et d’Anatolie (Seyde, Smyrne…). Comme il est de coutume, le navire doit présenter une patente de santé, qui détermine le temps de quarantaine imposé sur l’île de Pomègues (archipel du Frioul). Mais des petits arrangements entre le capitaine et le grand échevin de la ville, Jean-Baptiste Estelle, ont amoindri les causes des décès qui sont survenus à bord depuis son départ d’Anatolie – dont le chirurgien de bord ! Car le capitaine du navire a dû faire escale à Tripoli pour procéder à quelques réparations suite à une tempête. Entre autre, il a acheté tout un lot de voiles et de cordages à bas coût… du matériel qui provient d’un autre navire douteux, car ayant été affecté par des « fièvres pestilentielles ». Il l’ignore encore, mais il rapporte le bacille de la peste en fond de câle. Une trop courte quarantaine de 20 jours est autorisée au navire, afin d’arranger les affaires des notables…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les éditions Petit à Petit poursuivent leur collection historique sur les grandes villes de France en comblant une sérieuse lacune : Marseille est la deuxième plus grosse ville du pays et elle n’avait pas encore son album ! Or pour ce faire, le focus est porté sur un épisode qui fait terriblement sens avec notre époque : l’épidémie de peste de 1720. A l’aune de notre propre épidémie de covid-19, découvrir comment la cité phocéenne a été marquée par la peste, la dernière grave épidémie en France, au début du XVIIIème siècle, fait froid dans le dos. En effet, sur les deux ans que dura l’épidémie, 40 000 marseillais périrent (la moitié de la population) ; et le quart de la population provençale. Comme pour chacun des albums de cette collection, l’album alterne les séquences de BD et les parenthèses documentaires, iconographiques et didactiques. On découvre ainsi par quel biais et par quelles négligences lucratives la peste a débarqué ; on découvre à travers de nombreuses représentations les conséquences horribles sur la population ; on apprend les noms d’authentiques héros – le chevalier Roze et Monseigneur Belzunce. Les séquences BD nous emmènent certes aux côtés d’un personnage de fiction (Bérargue), mais celui-ci se confronte consciencieusement aux différents paramètres authentiques de l’épidémie. Elles sont dessinées avec un vrai savoir-faire réaliste par Fred Levy, qui s’est sérieusement documenté sur les tenues, les intérieurs et l’urbanisme de l’époque. On note juste une séquence incompréhensible (p.55). De même, les zooms documentaires complètent le sujet avec force témoignages et iconographies utiles, malgré quelques limites (mauvaise légende p. 65 ; une reproduction floue p.48-49).
