L'histoire :
A l’approche de décembre, Jonas commence à avoir peur. Comme tous les 12 de sa communauté, on va lui attribuer de nouvelles fonctions. Il appréhende cette cérémonie. Sera-t-il pilote, jardinier, technicien de vélos, poseur de route ? Ses parents tentent de le rassurer car tous les enfants de son âge suivent le même rituel. Dans la famille, le père est nourricier. C'est à dire responsable des besoins physiques et émotionnels des jeunes. C’est un travail important pour la communauté. Le père de Jonas est inquiet pour un des jeunes petits mâles : il a un caractère charmant mais il ne grandit pas comme il devrait et il ne dort pas bien. Il a été placé en soins spéciaux pour des attentions renforcées. Mais le comité parle déjà de le délier. Seuls deux cas de déliement ne sont pas des punitions : le déliement des gens âgés après une vie pleine et celui des jeunes déclarés inaptes. Les personnes qui commettent une troisième transgression aux règles de la communauté peuvent également être déliées...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Sur leur ligne éditoriale, les éditions Philéas continuent de proposer des adaptations des romans à succès, entre autre de science-fiction. A l’origine, Le Passeur est un roman de Loïs Lowry publié en 1994, récompensé par de nombreux prix (notamment la médaille Newbery). Il s’est vendu à plus de 5 millions d’exemplaires à travers le monde. Cette histoire se déroule dans une société en apparence harmonieuse où il n’y a ni guerre, ni chômage, ni pauvreté, où la douleur, les souvenirs et même les sentiments n’ont aucune place. Les familles sont uniformes avec 2 enfants (un garçon, une fille), elles sont très respectueuses d’un ordre établi et la destinée de chacun est tracée depuis son plus jeune âge par des sages. Ceux qui ne répondent pas ou plus au modèle de cette société seront « déliés », mais personne ne sait exactement ce que cela signifie réellement. Jonas, à l’occasion de la cérémonie de ses 12 ans, devient « Receveur de mémoire » : il va se retrouver l’unique dépositaire de l’histoire de l’humanité. Il va découvrir comment était le monde quand il y avait des couleurs, des animaux, des guerres, etc. Passés les premiers chapitres de mise en place d’un contexte singulier qui peut surprendre, ce récit qui mêle SF et philosophie devient fascinant. La dystopie dépeint une société aseptisée des plus angoissante. Malgré une apparente sérénité, les individus se ressemblent tous, ils n’ont pas de libre arbitre et doivent annihiler tout sentiment. Au fil des transmissions des souvenirs, on perçoit un malaise progressif chez Jonas. Ce monde utopique va s’avérer effrayant ! Cette histoire intelligente s’adresse avant tout à des adolescents et pourra nourrir leur réflexion sur la liberté. La narration embarque progressivement le lecteur avec une forme de tension qui s’installe au fil des découvertes de Jonas. Le dessin réaliste moderne, subtil est efficace. L’absence de couleurs au début du récit donne une ambiance froide qui installe d’emblée le récit dans un univers neutre, voir stérile. Le passeur est le premier volume d’une trilogie. Espérons que L’élue et le Messager soient également adaptés en BD avec la même fidélité aux récits de l’américaine Loïs Lowry.