L'histoire :
L'été 1947, Marcel Desharnais découvre Guyenne lors d'une visite avec la jeunesse catholique agricole. Il décide de rejoindre la colonie en octobre de la même année. Rapidement mis au courant du règlement bien spécifique d'une coopérative partageant tout, c’est à dire défrichage, travail du bois, construction des maisons et granges de chacun et 50 % des gains, il va se mettre au travail et participer au travail de bûcheronnage, essentiel dans cette contrée boisée reculée. Une fois son terrain cultivable, et une maison de voisin acquise, il fait venir Antoinette, avec laquelle il se marie au village. Durant vingt ans, entourés de leurs onze enfants, ils vont s'investir dans le dur labeur qu'exige la communauté, tandis que Marcel, en plus de son investissement dans différents comités, s'est lancé dans l'agriculture, un projet compliqué sur ces terres peu arables. Cependant, les temps changent, le gouvernement réduit ses aides, et c'est sur un goût d'inachevé qu'ils quitteront ce qui est devenu un village en 1968, allant finir leur vie dans une autre région.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Francis Desharnais est un auteur ayant déjà produit 10 livres, dont 6 aux éditions québécoises Pow Pow lorsqu'il publie La Petite Russie. Se basant sur le témoignage de son grand-père, Guyenne, vingt ans sous le régime coopératif... et après, paru en 1983, il souhaite rendre hommage à ces colons qui ont cru à un nouveau modèle de société. Il offre aussi au passage une Mémoire à sa famille. Il est épaulé en cela par les témoignages de sa tante Yolande, très engagée alors au sein de la communauté, surtout après le départ de ses grands-parents, et entre autre pour la reconnaissance des femmes. Desharnais a aussi bénéficié des conseils de Frédéric Limieux, historien, tandis qu'une résidence d'écriture à Bordeaux, grâce à l'association 9-33, et au Conseil des arts du Canada lui ont permis de réaliser cet ouvrage. Très informative et superbement menée, cette aventure biographique donne un aperçu assez juste des romans graphiques que l'on peut trouver dans le catalogue des éditions Pow Pow : un ton juste, un dessin simple noir et blanc, fluide et agréable, et, bien souvent, des tranches de vie exceptionnelles. La spécificité du langage de nos voisins québécois rajoute aussi au plaisir que l'on peut trouver à sa lecture. Mais l'essentiel, pour le coup, se trouve ailleurs, même si un glossaire et une bibliographie/filmographie sont inclus en fin de livre. Cet éditeur distribué dans les pays francophones depuis 2016 ne restera pas petit en France bien longtemps, on peut l'espérer.