L'histoire :
« L'ergot du seigle est un champignon se développant sur certaines céréales qui fut notamment responsable au moyen-âge de l’ergotisme, une maladie liée au seigle utilisée pour fabriquer le pain. Les symptômes de cette maladie incluent convulsions, nausées, maux de tête et hallucinations similaires à ce que provoque le LSD ». En référence à l’ermite saint Antoine, que le diable aurait assailli de visions tentatrices, l’ergotisme, qui donne également l’impression d’être brûlé vif, fut baptisé « Feu de Saint Antoine ». Un moine du XXIIème siècle, dans son cloître, s'interroge : « Chaque jour, mes frères pressent un raisin pour que l'on élève la coupe de ton sang. Chaque jour, je pétris un pain afin que l'on partage ton corps... Mais alors, où es-tu ? » L'autre moine qui va être témoin de ces questionnements sacrilèges va périr, à moins que tout cela ne soit qu'un cauchemar, car le premier va subir d'étranges visions...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après ses précédents opus – La Terre creuse et le primé Hound Dog – Nicolas Pegon souhaitait casser les codes et ouvrir le gaufrier habituel de ses planches. Originaire d'Alsace et ayant été enfant de chœur, enfant, il s'intéresse au phénomène de l'ergotisme et à Saint-Antoine. Ce dernier apparaît sur le retable d'Issenheim, visible à Colmar, non loin de chez lui. Ce moine étant né en 251 en Egypte a été le père fondateur du monachisme chrétien. Moyen-âge, questionnement théologique et psychédélisme des années 60 offraient un projet scénaristique et graphique particulièrement intéressant pour le challenge des petits formats typiques de l'éditeur. Il mêle dessin en noir et blanc et typographie dans le style médiéval pour l'introduction historique. Puis il met en page et couleurs fluo excentriques, pour l'aspect « trip » façon Breaking Bad. L'auteur nous transporte ainsi avec brio dans un maelstrom fascinant. Le passage où l'écriture s'étale en spirale, sur deux pages côte à côte, invitant à tourner le livre tel un volant de voiture, finit même par nous retourner le cerveau et nous inciter à repartir dans le sens inverse de lecture. Un beau et bon livre atypique et sûrement l'une des pépites des surprenantes éditions Réalistes.
