L'histoire :
Alicia Alonso est une véritable légende dans son pays. A tel point que son image va servir à des fins politiques pour promouvoir la révolution cubaine. Elle devient une icône du Castrisme. En 1959, Cuba voit en effet arriver au pouvoir Fidel Castro, après le renversement de Batista. Amanda est une danseuse douée et passionnée qui rêve de rencontrer Alicia Alonso, son idole depuis l’enfance. Sa mère Josefina vit cet amour de la danse par procuration à travers les pas de sa fille. Ainsi Amanda porte sur ses épaules tous les espoirs de sa famille. Il y a aussi Manuela, une jolie métisse douée mais recalée du ballet dans ses jeunes années. Elle pense que sa couleur de peau en est la cause. Aujourd’hui elle se débat au quotidien pour subvenir aux besoins de son fils en vendant des œufs sur le marché, en dansant dans un cabaret le soir et en se prostituant parfois. A la fois forte et courageuse, malgré sa cécité grandissante, Alicia Alonso va poursuivre sa carrière et continuer à enseigner pendant plus de 50 ans. Sa réputation et sa rigueur fascinent, mais ses penchants politiques divisent. Certains la juge opportuniste. Les cubains vouent un culte à leurs ballerines au détriment de la religion. Alicia rivalise avec la Cachita, la sainte patronne de la ville. Dans les années 60, avec son mari Fernando Alonso , Alicia ouvre une école de danse nationale pour faire entrer la danse dans le quotidien des cubains. Avec l’appui du Che dans ce projet, Alicia met sa compagnie au service de la Révolution. L’objectif est de populariser le ballet, le rendre accessible à tous pour toucher plus de gens. C’est par la danse qu’ils visent à réunir les cubains pour la cause. Ils vont également introduire petit à petit le métissage dans les ballets. Ils sont à l’origine de nombreux changements à cette époque dans ce milieu. Alicia et la jeune Amanda sont deux femmes aux vies parallèles. Avec Alicia, c’est l’art de la danse, la vie idyllique. Elle deviendra un modèle pour inciter le peuple à rejoindre le mouvement cubanidad. Pour Amanda, plus fragile et nuancée, c’est la dureté du métier et ses travers avec la réalité de la vie à Cuba. Amanda ira-t-elle au bout de son rêve ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La journaliste et cinéaste Eileen Hofer a réalisé en 2015 un documentaire sur Alicia Alonso. C’est en rencontrant Mayalen Goust, que nait l’idée du livre qui s’inspire de son reportage, cette histoire dessinée qui mêle réalité et fiction. L'illustratrice Mayalen Goust s’est lancée dans la BD il y a quelques années. Son graphisme aux tons pastels est doux et épuré. Elle nous offre de beaux panoramas de La Havane mais également des croquis et des pas de danse d’une justesse et d'une grâce parfaites. L’ouvrage présente un découpage par numéro, sachant que chacun correspond à une des cinq positions des pieds de la danse classique. Le lecteur navigue entre deux époques, entre 1959 et 2011, sans jamais se perdre. Les flashbacks sont maîtrisés. On découvre avec effroi les doctrines du régime autoritaire des frères Castro. A la fin de l’album on peut voir un cliché authentique noir et blanc d’une Alicia Alonso et d’un Fidel Castro qui semblent proches. C’est le destin de trois protagonistes que tout semble opposer et pourtant qui se retrouvent autour d’une même passion, à une différence près. L’une, de part sa célébrité, va devenir un objet de propagande communiste, alors que la seconde va simplement vivre difficilement, avec le regret de ne pas avoir eu sa chance ; la troisième va danser dans les pas de son idole… et finir par la rencontrer. Aujourd’hui, le ballet cubain est reconnu dans le monde entier. En 2011, le Musée National de la Danse est inauguré à La Havane. De prime abord, on ne s’attend pas à cette découverte, pourtant la couverture peut donner quelques indices. Cependant ce n’est pas une simple histoire de danseuse mais plutôt un récit historique et politique. Ce destin artistique à visée politique est retranscrit sous un jour poétique. Qui aurait cru que l’art deviendrait un instrument d’idéologie !
