L'histoire :
Le 12 décembre 2016, la famille Martinez reçoit un coup de fil qui les laisse sans voix. Leur fils Jean-Frédéric, devenu Abou Othman quatre ans plus tôt, lors de sa conversion au djihad mené par l’état islamique, vient de mourir en martyr en Syrie. Félicitations… Aussitôt, la cellule d’écoutes anti-terroristes, à la Direction Générale de la Sécurité Intérieure, remonte l’info. Un agent est chargé de recouper l’information, afin de la certifier. Après des recherches sur Internet et quelques renseignements pris auprès d’un indic au MI6, il semble en effet que le jeune homme soit bien décédé. Le commandant de la cellule apporte ensuite ces éléments au juge d’instruction Antoine Duquesne, afin qu’il lève le mandat d’arrêt proféré à l’encontre du jeune homme. Trois jours plus tard, une arrestation musclée se déroule dans un immeuble lyonnais. Nordine Charaoui, un jeune terroriste en devenir, est arrêté en délit de fuite et emmené au poste pour interrogatoire. Il est sommé de s’expliquer sur ses activités et ses exactions en tant que soldat du djihad lors de son séjour en Syrie. Le juge Duquesne propose aussi qu’il identifie quelques-uns de ses comparses, dont Abou Othan. Charaoui confirme alors sa mort avec certitude. Mais cette affirmation chiffonne le juge. Après une nuit blanche à travailler sur le dossier, il décèle que cette info ne colle pas au niveau des dates…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Rythmé comme un bon thriller d’espionnage, mais avec le souci de l’authenticité juridique et du vécu de terrain, cette nouvelle trilogie en devenir est un peu à la BD ce que l’excellent Bureau des légendes est aux séries TV. Il faut dire que le scénariste Matz, déjà pointu lorsqu’il est seul à la manœuvre, s’adjoint ici une documentation de première bourre apportée par un co-scénariste de prestige : Marc Trévidic, qui a réellement été juge d’instruction au pôle antiterroriste du TGI de Paris. De fait, si les protagonistes et l’histoire sont fictifs, tout colle incroyablement et d’angoissante manière aux attentats et exactions terroristes récemment produits en France. Au centre des débats, évidemment, le personnage du juge est un alter-ego de Trevidic dans ses fonctions. Il doit prendre des décisions lourdes de conséquences pour démanteler les réseaux, sans avoir toutes les informations ; et supporter les dégâts qu’elles engendrent. Sans compter l’opinion public qui s’affole logiquement à chaque exaction et pèse parfois de manière contre-productive sur la tactique juridico-policière à opérer. Le lecteur mesurera pleinement tout le poids d’une pareille fonction de juge d’instruction, et comprendra peut-être mieux la nature de la radicalisation, ennemi infiltré et insaisissable. Au dessin, Giuseppe Liotti propose ce qui ressemble à un trait crayonné sur-contrasté et complété par une colorisation informatique. Ce parti-pris permet de trouver un compromis très convainquant entre le réalisme nécessaire et le dynamisme souhaité.