L'histoire :
Josh Slocombe se remémore son enfance peu heureuse, tandis qu’une pluie glacée s’abat sur le pont du ferry qui le mène vers Terre-Neuve. Il se souvient de la manière violente dont son père, jadis marin-pêcheur, lui avait appris à nager avec endurance dans une mer difficile : à coups de rame dans la gueule. Aujourd’hui adulte, sans famille et sans travail, Josh est en quête d’un sens à sa vie. Bizarrement, il a décidé d’aller voir comment vit ce père qu’il n’aime guère, un solitaire qui s’est exilé dans un coin paumé de l’île de Terre-Neuve. Arrivé au port, Josh loue une voiture et demande la route pour Corner Brook. Il refuse de prendre un type à la dérive, qui connait pourtant la route. Josh roule de nuit et s’arrête finalement pour dormir à l’arrière du véhicule. Curieusement, il dépasse le lendemain le vagabond sur le bord de la route, mais accepte cette fois de le prendre en auto-stop… pourvu qu’il se taise. Le type se fait déposer à l’hôpital psy de la ville, où il réside. Une infirmière sympa indique alors plus précisément à Josh la route vers Meadows, un coin vraiment archi-paumé. Enfin, après avoir pas mal galéré, Josh trouve le bungalow de son père : vide. Les lieux sont à l’abandon depuis un bail, à en croire la sécheresse du cadavre de chien qui se trouve à l’intérieur. Au passage, Josh s’entaille profondément la main sur la serrure. Le lendemain, il débute de molles investigations pour retrouver son père.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ceux qui ont lu El Nino, Les Munroe ou Cap Horn savent que le credo de Christian Perrissin est le voyage et l’aventure contemporaine aux antipodes de notre France tranquille. Cependant, aux habituels tropiques chauds, le scénariste préfère nous emmener cette fois dans les rigueurs humides et paumées de Terre Neuve. Un tour sur Wikipedia vous remémorera l’austérité du climat de cette île canadienne, quasiment un personnage à part entière de la « quête initiatique » menée par un héros en quête de repères. Car c’est à une sorte d’enquête lente et contemplative que nous convoque l’auteur, au milieu de paysages peu touristiques, mais néanmoins vastes et envoûtants. La recherche de ce père a priori cruel, et donc négligeable, interroge. Pourtant, c’est dans son absence que le scénariste forge subtilement tout l’intérêt de sa narration. Le peu d’attachement que lui voue le lecteur tranche curieusement avec l’unique objectif du héros – et sa quête y gagne tout son sens une fois que le récit dévoile le passé. Bien qu’il ne sache pas vers quoi il va, Josh sortira grandement enrichi de son voyage auto-psychanalytique actif. Et au terme d’une tension qui monte crescendo, le lecteur aura le droit d’être estomaqué au moment d’une révélation choc. Christophe Gaultier met ce morceau de vie en images avec un trait semi-réaliste épais et juste. Ses ambiances graphiques et la colorisation de Marie Galopin jouent très justement la carte de l’ensoleillement crépusculaire et de l’omniprésence de la pluie, parfaitement en phase avec le sujet.