L'histoire :
Depuis quelques jours, Cham, un écrivain français d’origine cambodgienne, est la proie d’une conspiration qui le désarçonne au dernier degré. En effet, un roman baptisé Otaku, qu’il n’a pas écrit, est paru sous son nom chez un autre éditeur que le sien… et il est harcelé de petites piques énigmatiques par messagerie informatique interposée. Sa femme et ses amis peinent à le croire, et pensent qu’il est en train de devenir fou. Il semble en réalité qu’un hacker très habile l’observe de près en permanence et ait décidé de le rendre chèvre. Toutefois, il commence à avoir un début d’explications auprès de son père adoptif, qu’il a renié depuis des années. Ce dernier lui avoue que le nom d’« Okuta », une variante d’Otaku qui l’interpelle en rêve, signifie bien quelque chose : c’était le nom d’une fillette qu’il a jadis fréquentée au sein de l’orphelinat cambodgien d’où il est issu. Or, suite à un jeu d’enfant, à l’époque, Cham a involontairement poussé cette fillette sur une mine anti-personnelle. Cham se met alors à comprendre ses cauchemars. Doit-il aussi croire à une vengeance au long terme ? Les messages via Internet deviennent alors plus explicites…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le cliffhanger, à la fin du tome 1, révélait une piste sérieuse pour expliquer le harcèlement dont était victime l’écrivain Cham au cours de ce thriller psychologique en diptyque. Cette seconde et dernière partie se poursuit sur le même ton, essentiellement basé sur des séances d’explications entre les protagonistes. Et elle donne toutes les clés de l’histoire de fou dont il est victime (… ou coupable ?). A travers ce scénario habile, Didier Quella-Guyot propose une variante autour du « Big Brother » de 1984 (le roman d’Orwell). Aujourd’hui, à partir de la toile mondiale, ainsi que des moyens de géolocalisation et de télésurveillance, il est en effet tout à fait possible qu’un hacker très motivé et machiavélique parvienne à harceler quelqu’un comme Cham. Il est cependant dommage que le dessin de Jean-Claude Bauer soit aussi peu constant, alors même que l’identification des personnages et leurs mimiques crédibles sont essentielles au registre du thriller psychologique. Les grosses variations d’épaisseurs de traits trahissent un abus du zoom posteriori au dessin pour mieux coller au rythme du découpage. Le résultat est donc visuellement instable, tantôt ciselé, tantôt niveau rough, tantôt trop proche du cliché depuis lequel les décors ont été recopiés… Et les faciès fluctuent tout autant : Phil l’informaticien en p.6 a subi une sacré cure de rajeunissement en p.43 ; le héros lui-même adopte régulièrement des grimaces excessives qui l’assimilent à un caractériel finalement fort peu attachant. On ressort de la lecture des deux tomes avec une impression de bonne idée mal exploitée…