L'histoire :
Les presses du journal Germinal livrent le dernier numéro. Le procès Jacob fait les gros titres. La foule se presse autour du fourgon qui le mène au tribunal, et essaie d’apercevoir le visage de celui dont tout le monde parle. A l’intérieur, Alexandre Jacob essaie simplement de négocier une cigarette avec un des gendarmes qui semble l’avoir plus en sympathie que son collègue. Alexandre se dit que ce procès est l’occasion de décrocher une tribune publique où il pourra ouvrir les yeux du peuple. Jusqu’à présent, les bonnes gens sont aveuglées, à tel point qu’elles se rangent toujours du côté des oppresseurs. Comme le jour de son arrestation, il s’en rappelle bien, quand maladresses et imprudences le menèrent, lui et ses 2 complices, directement sur le banc des accusés. Tout commence par un début de cambriolage un peu trop bruyant. Un témoin se précipite à la gendarmerie pour signaler que des montes en l’air sont à l’ouvrage en ville. Les trois compères, confiants dans l’inertie de la maréchaussée, ne couvrent que partiellement leurs arrières et partent tranquillement jusqu’au village voisin. Quand les gendarmes leur tombent dessus à la gare, ses complices prennent la fuite après en avoir descendu un. Alexandre doit aussi faire feu pour se débarrasser du dernier. Il sera quand même rattrapé par l’estafette, alors qu’il reprend son souffle dans les hautes herbes.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A une époque où consommation et individualisme sont religion, revenir à une période lointaine où le mal était déjà à l’œuvre est le choix intéressant fait par Vincent Henry et son frère Gaël. Ils abordent le sujet par les rocambolesques aventures d’Alexandre Jacob, personnage hors norme, proclamé anarchiste, qui décida de voler les riches, mais pas n’importe lesquels : seulement ceux du côté de la loi, de l’Eglise, de la politique ou du sang. Narguant les autorités malgré les arrestations qui s’enchaînent, il paiera longtemps son engagement au nom des « pauvres ». Particulièrement bien documenté, le scénario de Vincent Henry retrace les moments clés qui ont contribué à façonner sa personne, ses valeurs et son engagement. Les lavis noir et blanc de Gaël Henry s’accordent bien avec l’époque et les personnages. L’imprécision des traits de ces derniers ne gêne pas leur reconnaissance, tant les physiques sont remarquables, tellement moins lices qu’un siècle plus tard ! L’atmosphère est également bien rendue (cf. les costumes…) et le propos carrément philosophique, comme le souligne la quatrième de couverture avec la fameuse citation de Joseph Proudhon « la propriété, c’est le vol ». C’est en effet un des enjeux de cet album : une réflexion sur la liberté de penser une société différente, dans un état conservateur où la bourgeoisie ne partagera jamais sa part du gâteau obtenue à la sueur du peuple qu’elle méprise tant. L’histoire de la vie de Jacob jusqu’à son départ pour le bagne de Cayenne revient sur les morceaux de bravoures d’un sans-grade qui, malgré ses démêlés judiciaires, traversera les épreuves, porté par son juste combat. Les péripéties s’enchainent comme dans un film d’action, faisant presque oublier qu’Alexandre Jacob, journal d’un anarchiste cambrioleur est un récit biographique à cheval entre XIX et XXème siècle.