L'histoire :
« A Haimen, les mecs ont peur de se tromper mais ils ont surtout peur de ne pas être heureux ». Ainsi en va t-il du quotidien de Tian, étudiant chinois qui veut profiter de la vie sans se poser plus de questions. Mais c'était compter sans son partenaire de vie B., son opposé, qui passe son temps à se torturer l'esprit, à s'interroger sur des questions existentielles. Alors Tian va commencer à y songer : au final, qui est-il vraiment ? Probablement un citoyen dépravé et égaré, homosexuel (c'est peut-être sa seule certitude), en quête d'expériences et d'identité. Sa vie est sombre, fade, glauque, à l'image de la ville d'Haimen dans laquelle il évolue. Il est confronté à la violence, à la sexualité, à la drogue et à l'alcool, à des rencontres instables parfois problématiques. En perte de repères, toutes ces choses ne sont pour lui que des bouées auxquelles il peut se raccrocher, qui lui permettent de garder la tête hors de l'eau. Bonne chance dans ta quête identitaire, Tian Fushi...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce roman graphique de plus de 200 pages aborde sans filtre la décadence d'une jeunesse chinoise qui cherche à donner du sens à sa vie. Il se peut que les illustrations vous évoquent quelque chose. L'auteur Seven a signé sa première BD, Red Angels en 2016. Dans Chinese Queer, nous retrouvons le même traitement des couleurs vives, presque psychédéliques, travaillées avec de nombreux jeux de lumières qui nous donnent l'impression que les personnages sont toujours dans des endroits sombres éclairés aux néons. Seven a toutefois poussé son travail de l'image encore plus loin, puisqu'ici les personnages ont des visages caricaturaux très expressifs, parfois effrayants. Les cases sont découpées de façon cinématographique et l'architecture y est pointilleusement détaillée. Ces dessins numériques aux couleurs explosives sont également entrecoupés de cases évoquant des images de vidéosurveillance. Le récit, quant à lui, est à l'image du personnage. Queer : mot signifiant étrange, peu commun, bizarre ou tordu. Ce mot résume à lui seul l'ambiance et la psychologie de Tian que nous suivons. Un homme auquel on s'attache difficilement, qui se cherche, qui n'arrive pas à se définir, et qui va plonger dans une vie de débauche et d'excentricité. Une intrigue au langage et aux illustrations crues, violentes, à ne pas glisser entre toutes les mains...