L'histoire :
Au Brésil, Ivo était un petit mécanicien, humble et discret, mais très doué. Un fumeur invétéré, toujours en mouvement, qui allait où le portait le vent, de petits boulots en petits boulots. Mais en 1989, arrivé à la cinquantaine, il est opéré d’un cancer de la gorge, une maladie qui ne lui donne plus que quelques semaines à vivre. Alors il entreprend un dernier voyage, rendant visite aux gens qu’il connait et qui l’aiment bien, discutant une dernière fois avec eux dans le maigre filet de voix qui lui reste. Après une ultime carte postale à sa sœur Floriana, postée depuis Porto Seguro, il disparait. Elle reçoit un avis de décès quelques jours plus tard, parti de Belem. Bien que plus jeune que lui, son « ami » Pedro est touché par sa mort. A partir des quelques indices donnés par Floriana, il décide de partir faire un road-trip, sur les traces du dernier périple d’Ivo, à bord de sa petite voiture. Maigre, cheveux mi-longs, taiseux, Pedro débute son enquête sur une plage de Porto Seguro. Il trouve le bar « Senegal », correspondant à la carte postale. Il y fait la connaissance de Vania, une bourlingueuse comme lui, mais de morphotype européenne, rousse, indépendante, mystérieuse, plutôt mignonne… Quelques regards suffisent pour que Vania accepte d’accompagner Pedro vers le Nordeste du pays.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
C’est l’histoire d’un road-trip qu’entreprend un jeune homme taiseux âgé d’une trentaine d’années, sur les traces d’un autre genre de taiseux, prénommé Ivo. Humble et tout aussi discret, ce dernier est mort et il laisse néanmoins un excellent souvenir à tous les petites gens qu’il a côtoyés au cours de sa vie. Ivo était en effet un mécano de génie, très attachant, qui se laissait porter par les petits jobs, sans trop savoir où allait le mener sa vie. A aucun moment le lien qui unit ces deux personnages n’est clairement explicité… mais il y a fort à parier que le premier soit le fils du second (du moins spirituel), pour expliciter ce besoin viscéral d’effectuer un road-trip sur les traces des derniers jours d’Ivo. Au périple de Pedro, s’alternent ainsi en flashback les séquences des dernières étapes d’Ivo, à travers le Brésil rural de la fin des années 80. A travers ce double voyage mémoriel, l’auteur franco-brésilien Nicolas Pinheiro dépeint surtout une philosophie de la vie, une manière de se nourrir des gens qu’on croise. Altruistes et raisonnables, Pedro et Ivo font des rencontres amicales et amoureuses, sans jamais se laisser distraire par une quelconque jalousie ou possession d’autrui. La bienveillance s’accorde à la fatalité, en proie à un destin qui nous échappe. Accompagné par des teintes ocre et délavées, le dessin semi-réaliste est splendide, au sein d’un découpage calme et très agréable à suivre. Les personnages sont éloquents avec trois fois rien d’expressivité et les décors variés nous plongent réellement dans l’ambiance moite et rurale, hors du temps.