L'histoire :
Hana se rend au temple de Jison au mont Kôya avec sa grand-mère Toyomo. Le moment est important car Hana va se marier avec l’homme choisi par sa famille. Hana a bénéficié des mêmes avantages que son frère aîné et elle a suivi des études poussées. Pour sa petite fille, belle et intelligente, sa grand-mère voulait un mari sans égal dans tout le pays. Au moment du choix du mari, Toyomo s’est imposé face à son fils, le chef de famille, en choisissant le fils Matani qui est maire du village de Musota, au lieu du fils Suda dont la famille est prestigieuse. Toyomo se base sur une croyance ancestrale. Le fleuve Ki s’écoule d’Est en Ouest, or pour se rendre chez les Suda, il faut remonter le cours du fleuve. Une femme doit toujours descendre le fleuve pour se marier. Et s’opposer aux forces ancestrales est un crime. Hanna a été éduquée dans la tradition, les arts ménagers et surtout le silence et la soumission de l’épouse. Hana aura deux enfants, dont une fille, Fumio. Elevée très classiquement, la jeune fille montre sa force de caractère et son esprit de rébellion. Elle refuse la soumission, rejette la tradition et prône son indépendance. Fumio aura aussi une fille, la dernière génération, Hanako, qui va se rapprocher de sa grand-mère et fera le lien entre la tradition et le modernisme.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cyril Bonin, auteur entre autres de Comme par hasard ou encore Stella (Vents d’Ouest), adapte en bande dessinée Les dames de Kimoto de Sawaka Ariyoshi publié en 1959 au Japon. Il n’est pas évident d’adapter un roman en bande dessinée. Il faut faire des choix narratifs pour réduire le récit, tout en gardant l’essence et l’idée principale portée par le roman. Le récit se focalise sur Hana et sa fille Fumio, tout en faisant une petite place dans le récit à sa grand-mère Toyomo et à sa petite fille Hanako. Le récit oppose fortement Hana qui incarne la figure traditionnelle de la gente féminine, assumant pleinement son rôle de maîtresse de maison ainsi que d’épouse dévouée et sa fille Fumio ancrée dans la vision moderniste de la société. Cependant, après de décès de son fils et enceinte, Fumio retourne auprès de sa mère au Japon et renoue avec la tradition en faisant un pèlerinage au temple de Jison pour assurer au nouveau-né une bonne croissance. Sawaka Ariyoshi joue sur ce destin tragique pour s’appuyer sur le poids des traditions ancestrales japonaises. Fumio donnera naissance à sa fille Hanako qui grandit dans un Japon fasciste et en guerre contre la Chine ; puis contre les américains et les forces alliées. Cette dernière est en opposition avec sa mère et souhaite retrouver une part des traditions familiales au bord du fleuve Ki. L’environnement graphique de l’album est superbe. Cyril Bonin, avec son trait réaliste et détaillé plonge le lecteur dans ce Japon du début du XXème siècle coincé entre le modernisme des grandes villes et la tradition des campagnes. L’auteur réussit son pari d’adapter en bande dessinée ce récit de la fin des années 50 sur l’évolution de la condition féminine et la recherche de l’équilibre entre tradition et modernisme.