L'histoire :
C’était pas sa faute, à Piquier… Mais plutôt celle de Brest, de St-Brieuc et de toutes les villes qu’il avait traversées. Et puis aussi la faute de cet hôtel du centre-ville. Celle de cette voix qu’il entendait en permanence. Celle de cette femme qui n’avait pas été surprise de sentir le canon de son arme sur son front et à qui il avait coupé un doigt… L’inspecteur Kowalski, lui, ne sait pas encore qui est Piquier. Mais le 15 octobre, il fait les premiers constats dans un hôtel du centre ville de Brest, d’un assassinat particulièrement remuant : une femme a été retrouvée étranglée et les pieds atrocement mutilés. Et puis surtout, il ne tarde pas, grâce au génie de Marius, un flic de la scientifique, à relier ce crime à un autre commis à St-Brieuc : dans les deux cas, un doigt de la main gauche a été sectionné. Pendant ce temps, Piquier est à Agen. C’est ce que lui a demandé la voix. Mais pas seulement. Alors, il s’est rendu à la gare, a planté une belle aiguille et coupé un autre doigt. La prochaine étape : un magasin de sport pour acheter une grosse raquette de tennis. Mais pas question de travailler son revers ou son coup droit. Ce qui lui importe, c’est la taille du tamis… Bref, Kowalski ne le sait pas encore, mais son enquête est loin d’être terminée.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
« Les zombies n’existent pas » !… Il aura beau répéter cette évidence, Kowalski. Mais à force d’indices, de visite au cimetière, d’indien mexicain et de faux sosie, l’inspecteur de police breton devra laisser vaciller toute logique pour tenter d’alpaguer un énigmatique tueur en série. Ce dernier, d’ailleurs, le récit ne tardera pas à nous le faire connaitre en superposant alternativement son point de vue à celui de Kowalski. Restera à nous faire découvrir le mystère des motivations de cet étrange quidam, au rythme d’une intrigue policière joliment ficelée et tutoyant habilement fantastique ou effroi… Pour sa première BD, Sylvain Escallon adapte brillamment – à seulement 23 ans – Lazarus, un roman d’Emmanuel Dadoun. Il y a évidemment dans l’exercice une incontestable force graphique, en particulier cadenassée par la puissance des masses d’encre noire et de blancs judicieux. Ce jeu de contrastes auquel se superpose un malicieux exercice de cadrage en cache-cache (les visages et leurs expressions) assoit très habilement l’atmosphère anxiogène du récit. Au-delà, Escallon maîtrise sans complexe (et en s’appuyant sur la construction originelle du roman) sa trame narrative. Mécanismes de l’enquête, psychologies des différents protagonistes, descriptions des assassinats, rebondissements, révélations des énigmes proposées, s’entrelacent ou se succèdent souvent rapidement et brièvement, mais sans aucun faux rythme. Cette marnière de faire dynamise énormément le récit pour finalement accrocher son lecteur de bout en bout. Voilà en tout cas de quoi aller se coucher en se préparant à faire de jolis cauchemars en noir et blanc. En attendant de découvrir les futurs projets d’un auteur prometteur…