L'histoire :
Le 9 janvier 2003, Majid, en provenance de Dakar, met les pieds sur le territoire français à l’aéroport de Paris-Charles-De-Gaulle. Muni d’un visa touristique, il vient rendre visite à Saly, sa belle-sœur, qui vit dans le XVIéme. C’est d’ailleurs elle qui lui fait la surprise de venir le chercher avec sa petite fille. Elle lui offre d’entrée un gros manteau bien chaud, la température n’ayant rien de comparable avec celle du Sénégal. Pour la remercier, Majid offre le taxi. Arrivés dans le petit studio de Saly, Majid prend ses repères et goutte ses premiers surgelés français, qu’il trouve terriblement fades, car absolument pas pimentés. Le lendemain, il visite la Capitale et reste baba devant les monuments et le luxe parisien. Cette vie n’est pas pour lui déplaire. Aussi, si Majid veut concrétiser son projet de s’installer définitivement en France une fois son visa expiré, il lui faut très rapidement trouver un travail pour ne pas rester à la charge de sa belle-sœur. Bientôt, il apprend qu’on cherche des vigiles payés au black. Chance ou début de galère ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pour livrer ce récit émouvant en 130 pages, Pierre Fouillet et Majide Bâ choisissent de se mettre à hauteur d’Homme plutôt que de faire vibrer la corde du pathos. Témoignage au cordeau de plus de 6 ans de galère d’un « sans-papiers » sénégalais, l’histoire de Majid ne revêt jamais les allures de drame. Et pourtant… Des premiers espoirs aux premières déconvenues ; de l’exploitation ordinaire ; de la faim qui tenaille (et offre pour pitance luxueuse une sardine quotidienne à notre « cannibale »), à la trouille permanente de se faire embarquer ; aux maigres salaires aussitôt arnaqués en passant par l’épuisement ou les joies de l’aide sociale labyrinthique : le parcours de cet immigré en quête d’Eldorado français est loin d’être un long fleuve tranquille. Néanmoins, le récit manie très habilement les émotions pour envelopper la tragédie de couleurs, de sourire et d’humanité, en confiant sa rythmique à un « personnage » central très rapidement attachant. L’exercice joue alors sa partition sociétale et politique sans militantisme forcené. Il expose aussi la problématique sans jugement, en usant juste de la force et du recul du témoignage. Aussi, bien vite, on se laisse absorber comme s’il s’agissait d’une fiction, par les enjeux de ce destin : Majid réussira-t-il son pari ? Lui, l’invisible dilué dans cette masse intouchable, a-t-il pris son dernier billet pour une descente aux enfers ? Son soleil peut-il encore briller ? Pour le savoir, il nous suffira simplement de vous confier aux ocres et aux gris du dessin ou au rythme narratif parfaitement ciselé par la mise en scène de Pierre Fouillet et découvrir ce témoignage édifiant.