L'histoire :
Boston, janvier 1924… Italo Serpio, un immigré italien, vient d’être invité par le lieutenant de police Bright T. Howard à se rendre sur les quais : sur le pont d’un paquebot en provenance d’Italie, on a retrouvé le corps de son frère Savino, une balle de gros calibre à la place de l’œil gauche. Immédiatement, Italo n’a qu’une envie : faire payer l’enfant de salaud qui a abattu son frère comme un chien malade. En attendant, il y a une autre surprise à laquelle il ne s’attendait pas. Son frangin était en effet accompagné de sa fille Luisa et du petit Marco, son fils cadet. Ce dernier, Italo ne l’avait jamais vu. Et pour l’instant, d’ailleurs, il n’est pas capable de lui trouver le moindre air de famille, puisque l’enfant a le visage totalement bandé et ne dit pas un mot. Il semble qu’il souffre d’un mal étrange… Quelques heures plus tard, Serpio laisse ses neveux s’installer dans son appartement, tandis qu’il va s’adonner à son activité principale : corriger les coquins qui n’ont pas voulu se soumettre au loyer imposé par le clan Manopello, un mafieux notoire du quartier North End de Boston. Il fait d’ailleurs si bien son travail que le beau Nicky, le bras droit du boss, lui propose une jolie promotion. Promotion qu’Italo imagine déjà lui permettre de servir certains autres de ses intérêts…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avec The corner, ce tandem d’auteurs transalpins ne livre ni un récit sur la mafia, ni une histoire de flics et de voyous et pas non plus une intrigue aux circonvolutions politicardes véreuses avec anarchistes ou affaires d’états. Tout au plus, il s’amuse avec brio à entremêler tout cela en saupoudrant cette savoureuse cuisine de vengeances à tiroirs, de coups tordus, d’honneur familial, de trahisons et de romance à l’arrachée. Maniant le suspens avec une incroyable maîtrise du rebondissement, des choix scénaristiques qui ne font ni dans la dentelle, ni dans la concession, ce récit s’avale à 100 à l’heure. On y retrouve d’ailleurs toutes les bonnes ficelles des meilleurs polars noirs du genre, avec la bonne surprise de ne pas tomber (semble-t-il) dans un « déjà vu ». La densité même du récit, le judicieux assemblage des intrigues, les dialogues percutants ou le jeu relationnel des personnages (toujours un peu empreints de mystère) offrent une si belle dose de rythme, qu’il en faudrait très peu pour imaginer cette trame portée sur grand-écran. D’ailleurs, la partition graphique semble plus proche du story-board que du dessin fignolé. Et si l’on peut regretter peut-être parfois son manque d’élégance, elle excelle sans conteste dans le rythme et le cadrage au cordeau. Il ne faudra donc pas se priver d’aller se mettre dans les pattes d’un italien adopté par Boston qui, en cette année 1924, devra se dépatouiller de l’assassinat de son frère même pas encore débarqué sur le sol américain. Avec en bonus : un neveu énigmatique, des projets avec un groupuscule anarcho-activiste (option Sacco et Vanzetti), des patrons mafieux peu dociles, des flics plutôt véreux et une bombasse du FBI pas commode pour deux cents. De quoi, en tout cas, vous rendre la partie complexe si vous décidez de trier bons et méchants.