L'histoire :
Dans la campagne morvandelle, par une soirée d‘hiver enneigée, une jeune femme déambule dans les congères. Eperdue, elle se réfugie pour la nuit dans la grange attenante à une maison isolée. A quelques centaines de mètres de là, à la lisière d’une forêt, deux « cailleras » de banlieue en flinguent froidement un troisième dans le dos. Ce connard de Foud’ a déconné : il a fait la pause clope de trop et tandis qu’il avait le dos tourné, la fille s’est échappée. Pendant ce temps à Auxerre, alors qu’une manifestation des routiers paralyse la ville, le gros Serge, son père, stresse dans un bar. Il reçoit finalement le coup de fil tant attendu : une demande de rançon de la part des ravisseurs de sa fille. Il ignore que celle-ci s’est déjà échappée, et ce ne sont pas les ravisseurs qui vont l’en avertir… Impossible pour Serge de s’en remettre à la police : il est à la tête d’une équipe de braqueurs qui vient de dévaliser un fourgon blindé. Les condés et les truands du milieu savent qu’il est le boss de ce que la presse a appelé le « casse de la sékur »… mais Serge est un pro et il n’a laissé aucun début de piste pour remonter jusqu’à lui. Le seul hic vient d’un de ses compères, qui s’est tiré avec le fric. Il ne peut donc pas l’utiliser pour payer la rançon… pour le moment, car Serge compte bien régler ses comptes. Dans un premier temps, il consulte néanmoins Gu’, un vieux parrain local, pour trouver un soutien financier. Il ressort avec un contrat express. Il a 3h pour régler tout ça…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Voilà un p’tit polar d’action en one-shot qui porte rudement bien son nom : de la première à la dernière planche, on est littéralement happé par une intrigue à haute tension impeccablement rythmée et mise en place. Cela commence par de courtes séquences disparates, où l’on comprend qu’on est au beau milieu d’une affaire déjà bien avancée. Une prisonnière en fuite, des petits voyous d’une brutalité stupide, un gros truand mis au pied du mur, des flics impuissants… Rapidement, sans avoir besoin de tonnes d’explications, on fait le lien et on se prend au jeu. Au scénario, Stéphane Piatzszek délivre habilement les informations, s’appuyant sur une parfaite connaissance des codes du milieu (il a scénarisé, entre autre, des épisodes de la série télé PJ). Piatzszek campe également l’action dans un cadre étudié : tout se déroule de nuit, en quelques heures, et majoritairement dans une campagne enneigée – pour le paramètre angoissant – et durant une grève de routier – pour se greffer à un contexte réaliste contemporain. Les économies de dialogues finissent de nous enthousiasmer pleinement, permettant de grandes séquences muettes qui fonctionnent à merveille (la fille ne dit mot chez la petite vieille, la vengeance ratée de Serge…). Evidemment, cela ne fonctionnerait pas aussi bien sans le dessin semi-réaliste parfaitement adapté de Stéphane Douay et la colorisation sobre d'Irène Häfliger. Des cadrages impeccables, un découpage dense, des encrages prononcés, un noir et blanc souvent juste rehaussé par quelques teintes carmin (tout se passe de nuit et sous la neige). Une excellente surprise !