L'histoire :
Céleste a quitté Monsieur Proust. Elle ne travaille plus pour lui. Seule, elle brode pour retrouver la délicatesse, la classe qu'incarnait Monsieur Proust. Car contrairement à ce que l'on pourrait penser, ce n'est pas le luxe qu'elle regrette. Céleste n'est plus tout à fait seule lorsque son mari rentre en permission. Mais lorsqu'ils sont tous les deux, ils ont du mal à se comprendre, à échanger. Ils ne voient pas les choses de la même manière. Céleste a mauvaise mine, son état se détériore de jour en jour. Pourtant, elle ne pouvait plus travailler pour Monsieur Proust, ce n'était plus possible. Son mari la verrait bien patronne d'un hôtel ou d'un café. Il a choisi : il va vendre sa Peugeot qu'il affectionne tant... Céleste lui en est reconnaissante de ne pas la renvoyer chez Monsieur Proust, d'autant qu'il lui doit toujours son dernier mois de gage, qu'elle n'a pas osé réclamer. Odilon la rassure, il va régler ce problème. En attendant, Céleste commence à travailler dans le bar de la sœur d'Odilon. Son mari l'y rejoint, il a une bonne nouvelle ; Monsieur Proust l'a remboursé, en doublant même la somme pour s'excuser du retard. Mais l'écrivain lui a aussi glissé que depuis le départ de Céleste, il n'arrive plus à travailler, et il semble très malade. Céleste s'agace. Elle le connaît, elle sait comment il fonctionne. Le téléphone du bar sonne. C'est le concierge de Monsieur Proust, qui souhaite parler à Céleste...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Chloé Cruchaudet vient clore son diptyque, autour de Céleste Albaret, qui fut au service de Marcel Proust. A travers sa vie et son travail, nous découvrons deux personnalités bien différentes. On voit que sans Céleste, l'auteur s'effondre. Elle constitue une aide du quotidien, mais nous lvoyons aussi qu'elle est une source d'inspiration pour ses écrits. C'est elle qui le porte, qui le bouscule. La grande figure de Marcel Proust est malmenée. On est bien loin de l'image dorée de l'artiste. Ici, l'auteur chouine, il est cloué au lit, il n'arrive pas à faire les choses par lui-même. C'est Céleste qui est valorisée, qui est montrée comme une femme forte. Chloé Cruchaudet nous embarque dans son histoire, grâce à un trait libre et dynamique. Les personnages sont toujours en mouvement, virevoltent. Elle ose des doubles pages ou des pleines pages, où les personnages naviguent, se déplacent, vivent sans qu'il y ait besoin de rajouter des mots. Ses autres planches en gaufrier gardent cet esprit de liberté. Les contours des cases ne sont pas tracés, ils existent grâce aux illustrations. Le parti-pris des couleurs est osé : du noir, du blanc, du vert et du violet. Pourtant, il fait ressortir la poésie du récit, l'onirisme qui s'en dégage. Chloé Cruchaudet signe une nouvelle fois un diptyque remarquable, savamment maîtrisé, tant dans la narration que dans son trait.