L'histoire :
Il y a toujours une première fois. Voire une deuxième. Voire une cinquantaine de suivantes…
Par exemple, au tout début, Jésus (LE Jésus) se savait investi d’une mission divine. Mais il ne savait pas forcément laquelle, ni comment s’y prendre. Campé devant le paralytique, il lui dit alors « Lève toi et boite ! » (manque d’ambition) « Lève toi, ture en zinc » (option humour), « Lève toi et vas chercher les croissants ! » (version macho).
De même, Roméo Montaigu (celui de Juliette), au pied du balcon des Capulet, a pas mal balbutié pour déclarer correctement sa flamme. « T’as des capotes ? » (très direct) « T’es belle comme une BM avec des jantes alu » (très blaireau) « Eh, j’ai retrouvé ta pantoufle » (très confus).
Quant à Moïse (y’en n’a pas 36), dont le peuple acculé par pharaon devant la mer rouge, devait débrouiller la situation au pied levé, a essayé de la soudoyer, de la boire, de pisser dedans, d’y aller à la nage ou en ski nautique.
Enfin, le jeune roi Arthur doit absolument retirer cette satanée épée – déjà, avec un nom plutôt suspect : Excalibur – de la roche pour accéder au trône. Il essaie de la huiler, de la flatter, de la chauffer au chalumeau, de s’entrainer sur une galette, un taille-crayons ou de balancer des formules magiques…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Une situation donnée et archétypée, tournée en ridicule… Bast et Matyo ont déjà commis cet acte impitoyable de parodie, aussi souple que jubilatoire, dans Le gardien de la tour (chez le Cycliste). Dans une veine identique, ils s’en prennent cette fois à 4 mythes « populaires », qu’ils tournent en dérision à l’aide d’une verve humoristique contemporaine assez inspirée. Le choix des personnages est éclairé : la simple évocation de leur prénom suffit à imposer une imagerie luxuriante : Jésus, Roméo, Moïse et Arthur. Leurs blagues finaudes sont également ponctuées de nombreux clins d’œil variés (Francis Cabrel, Star Wars, Cixi, le Dalaï-lama, les strings Aubade…). Ça sent les séquences de brainstormings fendards à plein nez ! Au dessin, Matyo profite au max des possibilités offertes par l’exercice (et des moyens modernes), pour copier-coller près des ¾ des éléments dessinés (ex : le paralytique, la mer rouge et Juliette sont quasi toujours les mêmes). Pour la forme, chacun des 4 héros mythiques dispose d’une planche d’intro (histoire de planter le contexte), suivie de pages découpées en gaufrier 3x3 gags/cases : 8 essais + un titre et une fausse citation comique dans la 9e. On a compté : Jésus doit s’y reprendre 88 fois pour tenter de faire marcher son paralytique, tandis que Roméo, Moïse et Arthur s’y reprennent 56 fois chacun pour s’affranchir de leurs missions respectives. Evidemment, si la redondance participe du concept, elle est aussi la limite de l’exercice : ces gags en 1 case sont à déguster avec parcimonie, à petite dose chaque jour, pour produire leur impact maximal. Allez les mecs, y’a encore plein de situations mythiques pour jouer avec ! (en vrac : la première tirade de Cyrano, la première invention de Léonard, le premier pas de Neil Armstrong sur la lune, la première pomme de Guillaume Tell…)