L'histoire :
L’humanité n’est (presque) plus. Il y a quelques dizaines d’années, les hommes ont fini par se faire une guerre totale, qui a transformé la Terre en un champ de ruines. Ou plutôt qu’un champ, les quelques survivants parviennent à subsister au sein de refuges hauts perchés dans les montagnes accidentées et enneigées. Parfois, ils sortent emmitouflés pour aller chasser ou récupérer de quoi s’alimenter… mais les zones radioactives sont légion et de nombreux raids et pillages sévissent. Tous ont oublié les racines de cette apocalypse, mais tous n’ont pas hérité des mêmes technologies du passé. Certains utilisent des drones tueurs ; d’autres sont simplement armés de carabines. Un homme, appelé Sol, a entendu parler d’un « enfant bleu », qui vivrait au sein du « sanctuaire des ombres » et qui détiendrait la clé de la mémoire perdue des hommes. Alors Sol a quitté son clan de la cordillère, et s’est mis en route, seul, hors-zone, en direction de cette cathédrale à très haute altitude, vers le Nord-Nord-Est, son fusil à lunette en bandoulière…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le titre est une petite supercherie. Plutôt que d’Inexistences, il faudrait parler ici de « post existences ». Dans cet ouvrage grand format et grand luxe, qui a demandé 5 ans de maturation à Christophe Bec, l’auteur aveyronnais propose une immersion en dehors des sentiers battus de la bande dessinée. Il y a certes quelques séquences de BD, mais il faut plus envisager cet album comme un livre concept, qui tourne autour de la survie humaine après l’apocalypse – une thématique chère à Bec. Sur le plan civilisationnel, c’est sacrément moche… En revanche, sur le plan des panoramas proposés par Bec, c’est a contrario somptueux. Ne vous demandez ni comment, ni pourquoi – puisque la mémoire et les raisons de l’effondrement ont été oubliées – mais après la chute de l’anthropocène, quelques humains survivent dans des montagnes enneigés, et plutôt celles où l’on a construit des bâtiments modernes et majestueux. Résultat : les vues des infrastructures en ruines accrochées à des roches glacées démesurées pullulent à côté des hommes tout petits, qui regardent cela comme les réminiscences d’un passé qu’ils ne comprennent pas. A travers ce projet, Bec réussit son hommage aux grandes années des Humanoïdes associés et de Métal hurlant – une nouvelle de 9 pages, plutôt flippante dans son registre de SF, porte d’ailleurs ce titre. S’il permet une évidente poésie de l’ère post-apocalyptique, les encadrés narratifs et le découpage en chapitres thématiques ne permettent cependant pas d’être totalement convaincus par cette triste époque, qui tourne un peu en rond. En revanche, c’est un plaisir oculaire de se laisser caresser la couenne par les bourrasques de vent glacé, face aux ruines d’une civilisation qui n’est pas encore pleinement la nôtre. Rarement présage sur ce qui nous attend n’aura été aussi tragiquement prégnant.
