L'histoire :
Karolus Magnus est donc parti avec ses armées pour repousser l'émir de Cordoue, le dernier de la dynastie arabe des Omeyyades. Il joue délibérément le jeu des sarrasins envoyés quémander son aide au nom du califat de Bagdad et de la dynastie des Abbassides. L'une des premières étapes de cette conquête devait être la remise des clés de la ville de Saragosse par son gouverneur, pour sceller l'alliance que les francs ont conclue avec lui. Mais si la soumission de Barcelone, cité wisigothe sous le contrôle des sarrasins, se déroule comme prévu, il en sera tout autrement lorsque les soldats de Karolus en personne arriveront devant la ville de Saragosse et ses fortifications. Sur la route des terres andalouses, il aura fallu traverser la Vasconie, le territoire dont l'autorité résiste au roi des francs, et dont Artza d'Ossau est vu comme le souverain légitime, contrairement au duc Lupus qui a assuré le roi de son soutien lors du passage des armées, mais qui a été renversé par un usurpateur nommé Irrumendi. Lorsque Artza disparait de la surveillance de Brunhilde, la missi dominici du roi, c'est l'incertitude qui règne sur ce qui les attend dans les terres proches des Pyrénées. La traversée va prendre plus de temps que prévue et la solidité de l'alliance hétéroclite construite autour des francs sera mise à rude épreuve.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avec une mise en scène directe et spectaculaire (on coupait toujours les têtes d'un coup sec, à l'époque, visiblement), Jean-Claude Bartoll nous emporte dans une page d'Histoire impressionnante et de toute évidence sans concession, lorsque les grands de l'époque se disputaient la domination des pays voisins. Le VIIIème siècle qu'il dépeint avec le dessinateur Eon est cruel, violent, animé essentiellement par l'esprit de conquête, les appétits sexuels du roi et de Brunhilde, les pillages et les coups fourrés. Alors, même si on est loin des images de Charlemagne dans nos vieux livres d'Histoire, on réalise la nature des enjeux de pouvoir de l'époque, l'importance de la parole donnée, les luttes religieuses qui se mêlent au pouvoir des rois. Ce deuxième tome (sur trois) réserve pas mal de surprises et prend le temps de consacrer une longue séquence d'ouverture à la fuite d'Artza, avec des scènes qui touchent à la magie. Le récit gagne du coup en profondeur, la conquête est lente, on se demande qui va se retourner contre qui et si on évite de creuser ses souvenirs d'histoire (lorsqu'on n'en a pas, c'est beaucoup plus simple), on se laisse prendre au suspense. Les auteurs, d'ailleurs, prennent soin d'ajouter les ressorts qui leur semblent nécessaires à tenir le lecteur en haleine. Tout cela est fort bien mené et ressemble davantage à une saga d'héroic-fantasy très plaisante, qu'à un pur récit historique. Ne boudons pas !