L'histoire :
Durant l’hiver 1994, le professeur Turan fait faire une visite de la cité souterraine de Saratli (actuelle Cappadoce, en Turquie) à son fils Hassan. 7 étages de galeries, de couloirs, de caches, jadis creusés par les premiers chrétiens dans le tuf volcanique, pour se protéger des abbassides et des omeyyades. Il lui avoue alors qu’il a accepté une nouvelle proposition de fouilles archéologiques, dans la région de l’Epire, en Grèce. Cette civilisation lui refait penser au mécanisme d’Anticythère et aux découvertes incroyables de l’époque antique. Parmi celles-ci, les savants grecs avaient émis l’hypothèse qu’une anti-Terre jumelle, appelée « Antechton » tournait elle aussi autour du soleil, mais qu’elle était invisible depuis la Terre, car précisément cachée par le soleil. Quelques temps plus tard, après la mort de son ami Kostas, Turan était allé cacher un mystérieux objet dans une des caches de le cité de Saratli. Enfin, bien plus tard, lors de son bond temporel dans le Paris de 1838, Turan rend visite au savant Jean-Charles Peltier. Dans sa demeure parisienne, il lui fait rencontrer son « ami » extraterrestre, en l’invitant évidemment à ce qu’il le regarde à travers un miroir, afin de ne pas perdre la vue…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Christophe Bec nous promène depuis 21 tomes maintenant, à travers l’Histoire et les concepts métaphysiques, au point de nous y perdre régulièrement. Les personnages font des bonds temporels à différentes époques (Paris du XIXème, Grèce Antique et futur apocalyptique). Or leur propre temporalité ne suit pas vraiment le même sens que leurs sauts temporels. Voire, ils évoluent dans des univers parallèles dystopiques. Sur ce canevas, se brode ainsi l’Histoire authentique, la prospective, la métaphysique, une invasion alien, des concepts complotistes… Et quand on sait que le tout est interprété différemment par différents dessinateurs – Jean Diaz officie depuis le tome 18, avec un style réaliste aussi propret qu’impersonnel – le risque est grand de noyer le lecteur. On aboutit logiquement à une forme de confusion, alors que pris indépendamment, chaque album apporte son lot de phénomènes de SF piquants ! Par exemple, l’Antechton qui titre ce volume, est un concept conspirationniste assez génial : il présuppose que la planète Terre a une jumelle, une anti-Terre qui tourne autour du soleil à la même vitesse, mais dans une unité espace-temps décalée ! On croise aussi la mythique « expérience de Philadelphie », chère aux complotistes, à laquelle aurait participé Einstein en 1943, et qui visait carrément à dématérialiser un cuirassier. Dans Prométhée, le résultat est aussi tragique que dans les adaptations ciné, avec des marins qui fusionnent au métal. Enfin, les personnages coincés sous l’antiquité s’amusent avec la question du paradoxe temporel, afin de savoir s’il faut aider les athéniens contre les syracusains. Car si Athènes devient une super-puissance, l’Histoire verra-t-elle émerger Rome et Jésus ? Quel joli bazar… La série peut encore se complaire longtemps dans les méandres du temps et des mondes parallèles, pourvu qu’elle sache à chaque tome se renouveler à travers un mythe ou une embrouille métaphysique nouvelle.
