L'histoire :
L'israélien Asaf Hanuka se sert de sa plume pour faire passer un message en une image ou une page. Un format qu'il chérit pour poser un regard acerbe, critique et sans pitié sur son pays, sur des politiques coincés entre traditions et modernités, sur les enfants, leur passé et leur futur, sur la culture, sur les religions... Au cœur de ses réflexions philosophico-politico-humoristiques, il se met en scène. Il évoque aussi bien l'influence qu'a eu sur lui L'empire contre-attaque à sa sortie et maintenant, adulte. Le rapport avec sa fille qui voulait regarder un dessin animé classique... cependant dans de nombreux d'entre eux on trouve une vilaine sorcière. On peut voir cela comme une façon de la préparer à ce que la vie adulte lui réserve. Qu'est-il possible de leur imaginer ? De toute façon, eux aussi vont prendre de l'âge et changer avec le temps. Le temps converge t-il vers l'abolition des libertés ? Pourra t-on continuer d'aimer qui on veut ? D'affirmer sa personnalité ? Les contextes comme celui de la pandémie ne remettent-ils pas tout en cause ? Le rapport à autrui et aux proches ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Asaf Hanuka poursuit ici fidèlement son œuvre d'introspection civilisationnelle, avec l'humour du désespoir à partager, car nous en sommes déjà au quatrième recueil. L'humour est bien présent, toutefois, même si ce n'est pas celui qui nous donne envie de nous esclaffer. On se range plus du côté de celui qui fait sourire, celui qui fait réfléchir ou celui qui rend triste de la réalité. Hanuka n'omet pas de faire moult références culturelles comme Max et les Maximonstres, Le petit chaperon rouge ou encore les super-héros de comics. Même s'il n'a pas besoin de cela pour faire passer un message, son ressenti, sa colère, son incompréhension, sa peur. L'absence de texte ne nuit pas à la compréhension de ses intentions, qu'elles soient critiques ou humoristiques. Et qu'importe s'il évoque une société légèrement différente de la notre – en l'occurrence israélienne – car nous nous retrouvons au cœur de son ressenti, ce qui ne demande aucune connaissance géopolitique. L'artiste parle de tout : du consumérisme, du jeu des apparences sociales, de la vie de couple, de celle de papa, du terrorisme, des trottinettes électriques, du véganisme, de la pandémie et bien entendu des médias et du téléphone portable. Un gag montre que ce dernier prend de plus en plus de place dans la vie des gens. Le téléphone arrache le visage du dessinateur et apparaît à sa place son crâne, d'un blanc immaculé. L'émotion est sur le téléphone, maintenant, et peut s'auto-afficher accompagnée au choix de rire ou de pleurs. Une histoire déroutante, assez percutante qui ne laisse pas le lecteur indemne. Tout comme la lecture globale de cet ouvrage qui nous pousse aussi à nous regarder, à regarder ce qui nous entoure, à nous poser des questions sur les choix sociaux et politiques, sur notre vision de notre monde.