L'histoire :
Et si nous considérions le football dans sa globalité comme une puissance géopolitique ? Le foot à en effet conquis le monde de façon pacifique, tel un envahisseur bienvenu et ardemment désiré. Aujourd'hui, il y a plus de membres inscrits à la Fédération Internationale de Football Amateur (207 membres) qu'à l'ONU (191 membres). « Il a fallu des siècles aux chrétiens pour accomplir cette mission (extension mondiale), alors que la FIFA la réalise en quelques décennies. » (FIFA Magazine). « À part boire, manger et procréer, la seule chose que des millions de personnes ont en commun, c'est le football. » (Simon Kuper) Les raisons de ce succès s'expliquent diversement. D'une part, tout le monde, tous les gabarits morphologiques peuvent jouer au football (Zlatan est un géant athlétique, Maradona plutôt petit et bedonnant). Ce sport ludique séduit toutes les classes sociales (initialement sport de l'élite britannique, il se développe dans les favélas). D'autre part, la pratique ne réclame aucun autre matériel qu'un ballon. Enfin, les règles sont simples, elles peuvent être détournées, arrangées, en fonction du terrain et de l'effectif. De fait, la coupe du monde créée en 1928 par Jules Rimet, et organisée tous les quatre ans dans un pays différent, est devenu un enjeu mondial incroyable. En 2014, la finale a été regardée par 3,2 milliards téléspectateurs...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce petit bouquin à couverture souple n'est pas précisément une bande dessinée, mais plutôt un essai de géopolitique synthétique et illustré. L'auteur, Pascal Boniface, est en effet Directeur de l'Institut des Relations Internationales et Stratégiques (IRIS), collaborateur à de nombreuses revues internationales... mais aussi membre du Conseil National de l'Ethique de la FFF (Fédération Française de Football). Il est donc doublement qualifié pour nous parler du football dans son rôle social et politique, de son instrumentalisation à travers l'Histoire, de son influence sur les relations internationales. Son parti-pris est celui du football en tant que puissance pacificatrice – les débordements trop souvent mis en exergues par les médias ne sont pas directement dus au football, qui incarne surtout un révélateur de tensions préexistantes. Boniface rassemble des dizaines d'anecdotes historiques sous différents chapitres. L'un revient sur l'utilisation du foot sous régime dictatorial (ex : la « victoire » de l'Italie de Mussolini en 1934), l'autre au racisme (ex : la France Black-Blanc-Beurre de 1998), un autre aux rencontres en marge de guerres réelles (ex : le match Angleterre/Argentine pendant le conflit des Malouines), un autre à l'engagement politique des joueurs (Socrates au Brésil, Drogba en Côte d'ivoire, Puskas en Hongrie... Jusqu'à Georges Weah qui devient président du Liberia !), etc. Ces nombreux rappels historiques, brefs et factuels, participent d'efficace manière à la démonstration. La formidable puissance de ce sport est due à son extrême popularité et à sa capacité à cristalliser l'appartenance à un peuple, à une culture. Entre semi-réalisme et caricature, les dessins et leur habillage en bichromie de vert sont signés David Lopez. De trop rares séquences de BD ponctuent l'ouvrage.