L'histoire :
Un soir grisâtre de septembre, au début des années 60, deux officiers de la brigade fluviale anglaise patrouillent sur la Tamise. Soudain, l’un d’eux repère une masse flottant à la surface, à proximité d’une pile du Tower Bridge. Ils repêchent alors le cadavre d’une jeune femme d’environ 25 ans, empaqueté dans une couverture. Les premiers éléments de l’enquête indiquent qu’elle a été assommée puis étranglée et qu’il s’agit vraisemblablement d’une française. L’affaire échoit logiquement au Quai des Orfèvres, entre les mains du commissaire Armand Raffini. Bougon et casanier, le policier n’a pourtant pas le choix : il doit se rendre à Londres pour travailler avec ses homologues de Scotland Yard. Le policier McGregor qui l’accueille à la descente du ferry est un sympathique cliché sur pattes : moustachu, roux, avec une fossette au menton, un costume au motif écossais et un nœud pap’. Tout en satisfaisant au rite du thé (abominable), Raffini constate que les premiers indices sont maigres. Heureusement, une chaussure féminine de marque française est retrouvée sur les docks et elle correspond à la pointure de la victime. Raffini et McGregor sont troublés. Car si la jeune femme avait été jetée à l’eau en cet endroit, le courant aurait dû l’éloigner de Tower Bridge…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Chaque nouvelle enquête du Commissaire Raffini a le p’tit goût d’un polar du dimanche soir sur France 3. C’est-à-dire sans grand-spectacle, sans grandes prétentions, mais ficelé à l’ancienne, par un maître-queue du scénario, Rodolphe. Efficacité et ambiance sixties (la marque Rodolphe) sont encore les qualités de cette « onzième » enquête – étant données les pérégrinations éditoriales de la série, on n’est plus trop sûr de la numérotation. On savait Raffini renfrogné et souvent bougon ; on le découvre ici casanier, limite chauvin, tout d’abord peu enclin à découvrir la culture britannique. Les détails croustillants de l’affaire et l’accueil réservé par un sympathique homologue l’aideront néanmoins à réviser son tempérament chafouin. Et on ne fait pas grande révélation en avouant que son flair et ses compétences viendront évidemment à bout de l’affaire. Un détail curieux frise toutefois l’erreur de script : à la fin de l’album, le policier anglais a totalement perdu son accent du début. Quant à lui, Philippe Maucler décline toujours son dessin en couleurs directes, un juste compromis entre des personnages réalistes et caricaturaux, souvent cadrés en plans serrés, aux faciès détaillés et expressifs. Seul petit hic sur le plan graphique, qu’on hésite à reprocher au dessinateur ou à l’éditeur : dans cet album, certaines pages pâtissent d’une définition baveuse, et les couleurs sont parfois saturées (ex. : le flou p.9, le rouge p.17). C’est d’autant plus rageant que d’autres plus nettes se montrent de toute beauté…