L'histoire :
Ils sont trois dans la tire, à choper au passage un quatrième gonze sur la place de la Concorde. Ils n’ont pas toute la nuit pour bottiner leur cambriolage dans le coffre d’un appartement parisien cossu, dans lequel se trouve un sac plein de thunes. Dédé s’est entouré de Max et de Bob, mais il lui manquait un champion du chalumeau… Et pour cette dernière recrue, il est allé piocher dans les vieilles amitiés de son daron : Pierrot. Avant guerre, Pierrot menait la grande vie, alimentée par des activités de brigand à l’ancienne, au côté du paternel de Dédé, alors adolescent. Pendant la guerre, Pierrot s’est distingué au sein de la Résistance, jusqu’à être décoré à la Libération. Mais aujourd’hui, il a raccroché et mène une vie paisible de retraité en compagnie de Marguerite, dans un simple pavillon de banlieue. Un potager, des clapiers à lapin et une petite activité de menuisier pour fabriquer des jouets en bois lui assurent de quoi vivre chichement… mais sans doute pas assez pour que Marguerite s’en sorte, s’il devait calancher prématurément. Alors Pierrot a accepté un « dernier gros coup », sous la houlette de Dédé. Oui mais voilà, tandis qu’ils jouent du chalumeau après avoir pénétré dans l'appartement par la cour arrière, une camionnette de flics garée sur le devant repère leur activité de soudeurs par la fenêtre. A la tête des cognes, se trouve le commissaire Raffini. C’est la scoumoune…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Notre époque bédessinée n’est plus tant que ça tournée vers le polar classique « à la française ». Un p’tit Jérôme K Jérôme de temps en temps, un p’tit Nestor Burma en alternance… Et à part ça, il faut aussi compter avec notre moustachu Commissaire Raffini, taciturne mais efficace. Dans cet épisode, il ne tient cependant pas le premier rôle, se contentant de serrer ce dernier. Le Pierrot qu’on voit courir en couverture sur fond de lune est un ancien malfrat rangé des voitures, qui s’autorise – hélas pour lui – un dernier coup, afin d’assurer, en cas de pépin, quelques subsides à sa… Frangine ? Femme ? Le terme « Gisquette » venant de l’argot du milieu, et dont un lexique est fourni en fin d’album, autorise les deux interprétations… et le scénario de Rodolphe entretient subtilement le doute. Pour le reste, le prolifique scénariste nous donne à suivre un cambriolage foireux – puisque Raffini il y a – avec quelques flashback en alternance nous révélant la gloire passée dudit Pierrot. Comme toujours dans Raffini, c’est carré sans jamais forcer le rocambolesque ; c’est habilement étayé par des psychologies de personnages attachants ; c'est emballé-pesé en 46 pages autonomes, qui laissent le seul mini-regret de se terminer sur un bilan amère, en une dernière planche rapide. Et encore « comme toujours », c’est dessiné avec beaucoup de précision et de talent par Philippe Maucler, fidèle à sa griffe réaliste et à sa colorisation au lavis en teintes sombres et fades.