L'histoire :
Juillet 1965 à Grenoble, lors d’une nuit de pleine lune, deux jeunes garçons sautent de toit en toit à la recherche du plus beau panorama de la ville pour discuter et refaire le monde. Etudiant dans une école militaire qu’ils appellent « la boîte », ils bravent les interdits pour apprivoiser la peur, en faire une lampe torche pour avancer dans le noir. L’idée est folle, mais elle trotte dans leur tête : l’accomplissement de leur vie passera par un tour du monde à la voile bien costaud. Quatre ans plus tard, après de nombreux sacrifices et des petits boulots pour mettre de l’argent de côté, l’équipage du Damien prend le large depuis le port de la Rochelle. Les trois compagnons font voile vers l’Angleterre avec une première escale à Londres. Puis ils se dirigent au Nord vers Bergen, la capitale norvégienne des Fjords. Le périple n’est pas sans difficulté, avec un baromètre qui leur joue des tours et un avis de tempête force 10. Malgré tout, ils parviennent à remonter vers Tromso, puis vers Spitzberg dans l’Océan Arctique. Après une escale douloureuse pour l’équipage, dont une opération du rein délicate pour Jérôme, le troisième compagnon quitte le navire. Jusqu’en septembre 1973 et leur retour à la Rochelle, Jérôme et Gérard vont tout deux accumuler les grandes premières inédites comme la remontée de l’Amazone à la rencontre des populations locales reculées. Un voyage d’une vie et une amitié sans faille.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Qui de mieux que l’un des protagonistes de cette incroyable épopée autour du monde pour raconter son histoire ? Gérard Janichon se place dans le costume du scénariste et il le fait avec brio. Habitué aux grandes premières inédites, le navigateur possède plusieurs cordes à son arc. Le récit est très bien séquencé avec plusieurs flashbacks (ou analepses pour les puristes), qui rythment extrêmement bien le récit. Il n’est pas aisé de raconter une histoire, surtout personnelle, et d’intéresser le lecteur, qu’importe le défi fou qui est décrit. L’auteur use de plusieurs effets de style pour dérouler son récit. Les séquences sur le bateau avec des monologues ou dialogues entre marins est entrecoupé par de nombreuses rencontres qui permettent d’accélérer le récit de la grande épopée et de se focaliser sur les moments à rebondissement. Le roman graphique est conséquent : environ 170 planches. Mais il a ses limites. C’est un réel défi de condenser quatre ans d’une vie en si peu de place. L’environnement graphique est confié au talentueux Vincent, auteur entre autres de Chimère(s) 1887 édité par Glénat ou encore Liberty Bessie aux éditions Vents d’Ouest. Avec un trait semi réaliste et très dynamique, Vincent nous projette sur le pont du Damien en compagnie des deux protagonistes. Les décors sont nombreux et variés. Le lecteur voyagera du froid glacial du Pôle Nord à la chaleur lourde et pesante des tropiques, pour le plus grand plaisir visuel. Une mention spéciale à la colorisation faite à l’aquarelle qui apporte un réel plus à l’univers graphique de l’album. Les Fjords, les aurores boréales au Spitzberg, ainsi que la végétation verdoyante d’Amazonie, sont une vraie réussite. Damien est un récit très bien ficelé de l’épopée de deux jeunes marins autour du monde, parfaitement mis en lumière et illustré avec talent.