L'histoire :
Dans un appartement où le bazar règne, une jeune femme prénommée Renata essaie depuis des mois de concevoir un roman. Allongée sur son lit, elle semble prête à l'envoyer à un éditeur, mais refuse au dernier moment, des frissons lui parcourant la tête. Après un passage dans la salle de bains où elle tombe sur un rasoir ayant appartenu à son ex, elle reçoit un coup de téléphone de sa mère qui l'invite à dîner, sa sœur revenant d'Australie. Le repas ne se passe pas très bien et le prénom de l'ex de Renata, Gregg, est prononcé. De retour chez elle, elle se rend sur un réseau social et accepte une invitation à une crémaillère, celle de Gregg et de sa nouvelle petite amie. Plus tard, dans le métro, elle aperçoit deux types. L'un, très gros et allongé sur le sol, semble souffrir. L'autre a la peau noire et la chevelure rousse. Il hurle à l'aide et réclame de l'eau. Renata approche d'eux, pose son sac et court chercher à boire. À son retour, elle donne l'eau à l'homme à terre. Par contre, son sac a disparu et à l'intérieur se trouvait son ordinateur et le manuscrit. Elle demande aux deux types son sac, ils disent ne rien savoir. Quelque peu désabusée, elle erre en ville et se rend à la fête bien plus tôt que prévu. Là-bas, elle n'est pas vraiment la bienvenue. Alors que les festivités battent leur plein et qu'elle s'est plainte auprès de toute le monde, Renata aperçoit les deux types du métro. Ceux-ci se sont incrustés et sont partis pour mettre un sacré souk...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les éditions Vide Cocagne proposent ici un album dont on risque de se souvenir longtemps. Aniss El Hamouri, raconte la lente chute de Renata, qui a quitté le foyer familial pour vivre avec son petit ami et écrire un roman. Dès les premières pages, nous la voyons célibataire, l'air hagard et vivant dans un appartement dans un tel bazar que même les grands-mères de C'est du propre trouveraient un endroit de compétition ! L'histoire nous montre les hésitations de la jeune femme, sa tristesse et son peu d'envie générale. C'est finalement lorsqu'elle perdra tout ce à quoi elle tenait, de ses idéaux à son précieux ordinateur, que Renata va découvrir un autre monde et y trouver l'espoir d'une place. Étonnante épopée, l'histoire va conduire le lecteur à s'interroger sur la signification de la vie et la manière de l'appréhender à travers des marginaux pour qui les pressions de la société sont bien loin. Avec un duo de personnages aussi bigarré que Corbeau et Beluga, l'auteur nous montre des facettes de l'humanité aussi complexes qu'émouvantes. Tous les deux s'auto-détruisent, mais pas de la même manière. L'un en cassant tout ce qu'il voit, l'autre en mangeant sans cesse. L'arrivée de Renata dans cette bande est la porte d'entrée parfaite pour le lecteur qui va essayer de comprendre comment une telle existence peut plaire et combler. Le récit est puissant, parfois violent, tantôt poétique. Dans le style, Aniss El Hamouri n'est pas très éloigné des récits d'un certain Manu Larcenet. Si la puissance sensorielle de ce dernier est palpable au niveau de l'histoire, cela n'est pas encore le cas concernant les dessins. Le trait fin et déformé de l'auteur de Comme un frisson est intéressant et souvent efficace, mais se perd parfois question lisibilité. Excellente surprise que cet album qui installe son auteur comme « the next big thing ».