L'histoire :
A 16 ans, Wendy perd le contrôle de sa voiture, tandis qu’elle passe sur un pont et qu’elle a ses deux petits frères à bord. Après une embardée, la voiture finit au fond de l’eau. Wendy et John parviennent à s’extraire et à regagner la surface, juste à temps pour voir Michael s’envoler vers le ciel, dans une lumière vive ! Wendy est conduite à l’hôpital, où elle explique ce qu’elle a vu aux policiers venus l’interroger. Ses parents et les autorités la prennent pour une folle lorsqu’elle affirme qu’elle a vu son petit frère s’envoler vers le pays imaginaire, à l’instar de Peter Pan dans le roman de JM Barrie. Elle finit chez une psy, qui lui conseille de dessiner dans un épais cahier tout ce qu’elle n’arrive pas à exprimer. John, lui, devient totalement mutique et renfermé. Ce silence rend Wendy encore plus folle car elle aimerait qu’il puisse confirmer que leur frère n’est pas mort noyé mais qu’il a bel et bien gagné le pays imaginaire. Tandis que Wendy vit cet enfer de culpabilité hallucinatoire, elle tombe amoureuse d’un garçon, au lycée, appelé Eben Peeters. Celui-ci a un regard enchanteur et parle peu. Le soir même où ses parents organisent un « enterrement » officiel pour Michael (d’une boîte vide !?), elle s’évade par la fenêtre pour rejoindre Eben pour une soirée alcoolisée…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Comme le projette le titre contenant ce prénom connoté, The wendy project est une énième relecture du célèbre roman de JM Barrie, Peter Pan. A la frontière du conte, ce roman est une allégorie du refus du monde adulte et il participe, dans ce « graphic novel » américain en one-shot, d’une thématique pas très éloignée, s’agissant de cette adolescente, Wendy, qui tient le premier rôle. Un rôle lourd à porter, étant donné que notre héroïne de 16 ans se retrouve responsable de la mort de son petit frère et que sa famille et ses thérapeutes la considèrent comme folle. Et pour cause : elle affirme que son frère n’est pas mort, mais qu’il a rejoint le pays imaginaire ! Cette explication serait-elle un mécanisme inconscient de son cerveau qui refuse d’endosser une culpabilité trop lourde à porter ? Ou existe-t-il réellement un monde parallèle féerique où s’est réfugié Mickael, dont on n’a pas retrouvé le corps ? La scénariste Melissa Jane Osborne entretient savamment le doute. Elle joue avec les noms des protagonistes (Peter, Peeters), avec des citations du roman, avec les rêves, les illusions, les indices dans la réalité… Certes, en France, la cause première de ce problème semble bizarre. Qu’une adolescente de 16 ans puisse conduire une voiture, sans avoir un adulte à côté, parait surréaliste… Mais c’est tout à fait possible aux USA, pays de première édition du roman graphique. Melissa Jane Osborne permet surtout à sa dessinatrice, Veronica Fish, de dérouler un trait semi-réaliste proche du rough, qui confère dynamisme et expressivité. La colorisation parcimonieuse se réserve au merveilleux : la réalité n’est que grise, noir et blanc. Si la mutation de l’adolescence trouve dans ce propos un terrain certes convenu, la douleur du deuil a rarement été aussi évocatrice.