L'histoire :
Alors que les agents spéciaux Shaw et McGregor poursuivent leur exploration du lieu cauchemardesque au cœur duquel ils sont désormais piégés, ils vont croiser la route d'un visage tristement familier. En effet, une des affaires les plus sordides et éprouvantes menée par les deux enquêteurs a été celle du tueur d'enfant nommé Carnahan. En dépit de leurs efforts, ils n'ont jamais réussi à inculper ce criminel psychopathe malgré sa culpabilité évidente, et c'est dans un acte désespéré que l'agent a décidé de l'éliminer d'une balle en pleine tête. Alors le retrouver bien vivant dans ce lieu maudit ne fait que renforcer l'aspect irréel et cauchemardesque de la situation pour Shaw et McGregor. Sont-ils toujours vivants et que signifie cette nouvelle apparition inquiétante ? Derrière son visage rond et enfantin, Paul Carnahan va questionner les deux agents sur la nature du mal en les confrontant à leurs propres souvenirs. De son côté, la directrice adjoint Driscoll met tout en œuvre pour retrouver ses collègues disparus, mais le poids de ses mauvais choix passés ne sera pas sans conséquence...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avant toute chose, il convient de prévenir les lecteurs que ce titre de Garth Ennis est à conseiller à un public averti, car son propos est à la fois dérangeant et perturbant. Rarement Garth Ennis ne nous aura plongés aussi implacablement dans un récit profondément noir et désespéré, qui révèle clairement sa vision pessimiste d'un monde à la dérive qui sombre dans l'extrémisme, l'intolérance et la violence. Pas de trait d'humour pour faire passer la dureté de son message : le scénariste irlandais livre ici un récit sans concession, âpre par moment pour certains, mais qui a le mérite de ne pas chercher la facilité. Les dialogues deviennent des réflexions sur la nature du mal et d'une certaine manière, des séances de psychanalyse douloureuse comme pouvait l'être Rage, le roman controversé de Stephen King. Les scènes d'action sont ici quasi inexistantes tant la violence du propos se suffit à elle-même et ne nécessite pas de surenchère visuelle. Cette promenade en enfer perturbe le lecteur qui ne distingue plus ce qui est réel de ce qui ne l'est pas, et toutes nos croyances, ainsi que nos repères, s'en retrouvent chamboulés. Avec son graphisme classique et efficace, Goran Sudžuka parvient à poser subtilement son style de dessin très polar qui fait judicieusement le contrepoids avec l'ambiance fantastique et horrifique. Pour Garth Ennis comme pour le groupe IAM dans le film La Haine, « la fiction devient réalité et la réalité un cauchemar » et surtout, il fait passer aux lecteurs un message limpide : le mal ne disparait jamais, il attend son heure…