L'histoire :
C'est lors de sa seizième année qu'elle rencontra l'homme dont elle tombera éperdument amoureuse. Le visage d'un dieu avec ses cheveux d'or et sa barbe de bronze, elle donna son corps à celui qui se révéla être en fait un roi. Elle s'installa dès lors avec lui au château, au sein duquel habitait aussi la fille du monarque dont le portrait de la mère décédée surplombait la cheminée. Étrangement, la présence de la princesse était teintée de mystère jusqu'au jour où elle apparut dans la chambre de la reine. Cheveux noirs tels la nuit, le teint pâle comme la neige et des lèvres rouges de braise, elle s'approcha sans le moindre mot. Comme elle semblait avoir faim, la reine lui offrit une pomme séchée, mais cette dernière préféra mordre la main de sa belle-mère. Elle se régala de son sang, puis s'évanouit dans l'obscurité. La plaie se referma rapidement et guérit miraculeusement. Désormais une chape de plomb semblait être tombée sur le royaume, et les désirs charnels du roi s'étaient évaporés en même temps que sa santé allait en déclinant. Tragiquement veuve de celui qu'elle aimait avec tant de force, elle décida de se venger de ce démon aux traits d'enfants.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Neil Gaiman est un immense écrivain qui puise souvent ses inspirations dans la mythologie, le folklore et les contes classiques. Que ce soit dans ses romans tel American Gods ou dans sa célèbre série de comics Sandman, le scénariste britannique aime conter des histoires intemporelles. Basée sur les grands classiques de la littérature mondiale, il en fait quelque-chose d'unique à travers le prisme de son imaginaire fécond. Cette fois-ci, il se penche sur une histoire qui a connu de multiples versions à travers les époques, un célèbre conte des frère Grimm, repris bien entendu par Disney pour le cinéma. La vision de Neil Gaiman se rapproche évidemment beaucoup plus de la version originelle, avec sa morale cruelle et terrifiante. Le scénariste va même encore plus loin en inversant les rôles des principaux protagonistes et en y ajoutant une ambiance gothique idéale pour un récit vampirique. En plus d'être un brillant écrivain, il est aussi clairement doué pour dénicher des talents graphiques à même de donner vie à ses songes les plus torturés. Ainsi, c'est l'artiste Colleen Doran qui adapte visuellement ce récit avec des dessins somptueux à la frontière de l'illustration classique et de la bande dessinée. Admiratrice du travail de Harry Clarke, elle réalise un travail extrêmement minutieux qui rappelle à la fois le style art déco et l'esthétique des vitraux. Un conte pour adultes qui a du mordant et vous fera frissonner à coup sûr.
