L'histoire :
Il se réveille seul, quasi nu dans une grotte. Il entend des bruits dans la rue. Non pas dans la rue, tout proche. Dans un des coins de la grotte ? Non pas dans un coin. Vraiment tout proche, dans sa tête. Et cette voix qui lui parle de lui. Elle lui demande comment il s’appelle. Facile : il s’appelle Peter Stanchek. Mais pour les autres questions, c’est autre chose. Il ne se souvient de rien, comme si on lui avait lavé le cerveau. Il sait juste que c’est une bombe ambulante, une arme nucléaire à l’état pur. Comment il le sait ? Il ne le sait pas lui-même mais il sait juste qu’il peut potentiellement faire de très grandes choses. Un mot lui revient également et c’est son seul souvenir. Un mot qui ne veut rien dire et qui ne lui évoque rien à part qu’il doit s’en souvenir : Harbinger. Peter panique face à cette situation délicate. Son esprit s’emballe et sature et il entend cette fois d’autres voix, une myriade de voix qui pénètrent son crâne et qui parlent de sujets plus ou moins intéressants. Pour sortir de cet enfer, Peter court sans s’arrêter et il se retrouve suspendu en l’air, accroché au bras d’une statue. Il n’hésite pas longtemps et pour faire taire les voix, il saute. Il sourit comme s’il était enfin libéré. Il sait de toute façon qu’il va atterrir sans souci sur le sol. Mais qui est vraiment Peter Stanchek ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans la longue liste des super pouvoirs, il y a la catégorie « psiotique » qui a pris une place à part parmi la galerie impressionnante de personnages de chez Valiant. Fascinants, dérangeants, troubles, les psiotiques (entendez par là « super héros aux pouvoirs psychiques surpuissants ») ont toujours surfé sur une morale douteuse et ambiguë, à l’image de leur plus grand représentant, Toyo Harada. Il y a encore beaucoup à développer sur cette thématique puisque de nombreux personnages secondaires n’ont jamais été détaillés. Et c’est le cas pour Peter Stanchek, pourtant décrit à la base comme le plus doué de sa génération. Voici donc un « nouveau » personnage qui fait un retour fracassant dans l’univers Valiant. D’entrée de jeu, on lit un récit différent et qui part dans tous les sens. Une double voix narrative, une introspection de tous les instants, un sentiment de ne rien maîtriser et de ne pas tout comprendre : le style d’écriture de Collin Kelly et Jackson Lanzing n’épargne pas son lecteur mais cadre bien avec l’esprit complexe et torturé de Stanchek qui passe son temps à se chercher. A force de circonvolutions et de passages décalés, on finit par découvrir une révélation choc et énorme, une trouvaille géniale, bien dans le ton du potentiel infini des psiotiques qui repousse les limites de l’humain et par extension de la narration. Punk, perturbant, psychédélique… en gros, psiotique ! On se régale de cette écriture branchée et quasi futuriste sans compter un dessin ciselé et nerveux qui fait penser à Sean Murphy. Le trait de Robbi Rodriguez est sublimé par des couleurs flashies et saturées ultra audacieuses. Le tout aurait pu être démentiel et atypique s’il ne fallait pas coller au genre super héroïque. Et c’est tout le paradoxe de ce comics. Kelly et Lanzing ont adopté un ton novateur et quasi littéraire mais quand ils font dans le style bien connu du méchant contre le gentil, ça tombe à plat et ça dénote franchement par rapport à l’originalité du reste. « Sois meilleur » oui mais pour cela, assume ta différence jusqu’au bout !
