L'histoire :
En janvier 2002, New York est en ébullition. Le Forum Economique mondial (le F.E.M.) se réunit dans la grande ville américaine mais provoque une vague de scepticisme et de contestation. Un groupe s’organise pour résister à la mondialisation à outrance. Pour beaucoup, ce sont de jeunes adultes tout droits sortis de leurs études. Il y a Matt, Amol, Malcom, Steve et Angie. Beaucoup d’entre eux sont collègues et travaillent pour une boîte productrice de cours pédagogiques sur internet. Cependant, le responsable, John, est intransigeant et fait souvent recommencer les coopérateurs dans leurs activités. Angie est le fer de lance du mouvement contestataire et rallie de plus en plus de monde autour d’elle. Elle invite Matt dans des meetings et réunions d’organisation pour la résistance. Matt accepte alors qu’il n’y connaît rien en politique. Il faut dire qu’Angie est très belle. Amol, lui aussi, commence fraîchement à s’engager pour suivre les beaux yeux d’Angie. Les réunions socialistes sont très engagées et les discours rejettent en bloc le F.E.M. Beaucoup de militants sont inquiets de la politique de plus en plus capitaliste des Etats-Unis. Le gouvernement Bush est en plus très tendu après les événements du 11 septembre et la guerre au Moyen-Orient couve…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Mike Dawson signe ici un roman graphique atypique et original. En suivant le quotidien de jeunes adultes, il décrit les idées politiques des jeunes d’aujourd’hui. Profondément engagée, Angie est le centre de toutes les attentions car elle permet de réunir un maximum de personnes à sa cause. Cependant, l’engagement n’est pas si simple et les personnages vont devoir apprendre à vivre sous le régime capitaliste qu’ils détestent tant. Ainsi, l'auteur a la bonne idée de les montrer dans leurs activités professionnelles, tiraillés entre leurs idéaux et un job qui se fonde sur le rendement et le business. L’engagement socialiste est aussi une action difficile à tenir, d’autant que chacun a sa propre personnalité et pensée. En suivant le cheminement de pas moins d’une dizaine de personnages, on démultiplie la pensée collective. L’idéal socialiste est très vite en butte à l’individualité de chacun des militants. On a donc quelques belles scènes avec l’anarchiste désabusée, Kimmy. Cette dernière finit par exploser tant elle se retrouve mal dans les réflexions utopistes de ses amis. De plus, Mike Dawson mêle habilement politique et parcours personnel. L’amour peut être un frein à l’action mais en est souvent étrangement un moteur. Paradoxalement, Angie parvient à réunir beaucoup de monde grâce à son pouvoir de séduction. Avec justesse, l’auteur montre que l’engagement est multiforme et n’a pas toujours un point de départ « noble » et altruiste. Ce qui est le plus remarquable dans cette œuvre reste le soin apporté à décrire les personnages de l’histoire. Avec beaucoup de finesse, l’auteur laisse vivre ces jeunes new-yorkais, englués dans leurs pensées et leur vie. Sans parti pris ni critique politique, Mike Dawson brosse le portait d’une jeunesse bigarrée, vivante mais écorchée, idéaliste mais égoïste, forte mais fragile. Le dessin rond et à la limite de la caricature est toutefois plein d’humanisme, à l’image de cette tranche de vie sociale. Les passages sont entrecoupés de citations beaucoup plus sérieuses et politiques qui apportent un recul plus réflexif sur le capitalisme et l’engagement révolutionnaire. Une œuvre qui s’applique à montrer ce que peut être l’action politique, sans jugement de valeur ni militantisme.