L'histoire :
La guerre civile vient de s'achever dans un épais brouillard de neige glacée. Un ordre nouveau s'est imposé. Un groupuscule d'activistes, avec à sa tête James Hardin, le refuse. Il projette alors un attentat qui doit plonger le pays dans le chaos. Pour ce faire, James a dû risqué sa vie en dérobant des documents ultra secrets au siège de l'état major. Le général Hanslowe, quand il apprend la nouvelle, se met dans une rage sans nom. Pour récupérer ces papiers, il charge deux de ses agents, Calvin Engel et Pavel de retrouver Hardin. Seulement voilà, le duo ne s'entend guère car Engel soupçonne Pavel de comploter contre sa propre institution pour le compte des terroristes. Pour le prouver, Engel va chercher (et fabriquer) des preuves de la culpabilité de Pavel...Et, évidemment, rien ne sera conforme à ce qui était prévu, dans les deux camps...Le monde, plongé dans le froid et la pénombre, n'est peut-être pas bien loin d'une mort annoncée...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans Iron, première BD de S.M. Vidaurri, il faut accepter de ne pas tout comprendre au début, de se laisser porter par l'ambiance crépusculaire d'un pays qui baigne dans une froide incertitude d'autant plus inquiétante qu'elle laisse planer un mystère insondable. Et pour cause, l'auteur, volontairement flou sur les origines de la guerre civile, préfère interroger ses conséquences et le devenir de ses personnages, fantomatiques ou aveugles à leurs propres contradictions et en proie à de véritables cas de conscience : doit-on se sacrifier au nom d'un idéal ? Doit-on se battre pour des valeurs qui ne sont plus les nôtres ? Inquiet et curieux, on avance d'abord un peu à tâtons dans ce silence troublé et pesant, sans tout comprendre immédiatement aux relations complexes tissées entre les personnages animaliers, à leurs intérêts, à leur rôle : pions ou espions ? Traitres ou témoins ? Victimes ou bourreaux ? La question de la nature humaine est posée, tout comme l'importance de l'amour filial, de l'héritage coupable ou de l'espoir. Mais plus on avance et plus on aime ce rythme lent et étiré, ponctué de pauses contemplatives en suspension, d'autant plus envoûtantes que l'ambiance, cotonneuse et inquiétante, ne cesse de charmer. C'est la grande force du récit. Bien qu'un peu systématique, l'esthétique feutrée et épurée de Vidaurri au lavis confère au récit une véritable épaisseur, matérialise un sentiment diffus de peur, sous-tendus par une tension qui, sans faiblir, prophétise la tragédie à venir. Tout en parvenant à capter des instants flottants, métaphores des troubles les plus profonds. Le roman graphique, à l'édition très soignée, sonde ici la douleur de la perte, le renoncement, mais aussi ce moment du basculement où tout pourrait changer ou disparaître à jamais. Une question de choix, forcément cornélien.