L'histoire :
Appelez-moi Ismaël. On m'a nommé d'autres manières... qui vont de fils d'Abraham au nom du premier passant que vous croiserez... mais pour ce récit, ce nom fera l'affaire. Cette histoire a déjà quelques années... dont le nombre précis importe peu. A une époque où je me retrouvais planté devant les boutiques des croque-morts et me joignais à tous les cortèges funéraires que je croisais sur mon chemin, l'envie me vint de prendre la mer... Comme en tout temps et lieu, elle est venue à tous les hommes et leur vient toujours. J'embarquai, non pas comme passager, commodore, capitaine ou même coq -tout cela n'avait pas d'intérêt pour moi-mais comme simple matelot. Et qui n'est pas un esclave ? Dites-le moi ! Et puis, ce serait un travail honnête et sain. Et je partis chasser la baleine... car ce monstre si prodigieux et mystérieux, sa nature, ses coutumes, avaient éveillé toute ma curiosité... Et au demeurant, j'étais aussi tourmenté par une démangeaison incessante pour les choses lointaines. Mon périple me mena d'abord de Manhattan à New Bedford. De là, je rejoignais Nantucket, authentique berceau originel de la pêche à la baleine et je m'embarquais...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Quelle bonne idée a eu Delcourt de rééditer ce récit, paru en 2009 aux Éditions du point d'exclamation, alors accompagné d'une pièce musicale. Avec son format classique, celui des BD européennes, les peintures de l'auteur sont bien mises en valeur et à l'instar d'Ismaël, d'Achab, et du reste de l'équipage, le lecteur est embarqué dans un voyage fabuleux et particulièrement inquiétant. Pour adapter le roman mythique (aux textes parfois mystiques) d'Herman Melville, Bill Sienkiewicz bénéficie de la complicité de Dan G. Chichester, qui a essentiellement bossé pour Marvel et qui a également adapté des comics du Hellraiser de Clive Barker. L'association entre le texte et les peintures accouche d'une œuvre pour le moins impressionnante. Le graphiste américain, avec ses compositions aux tons particulièrement sombres, exploite à merveille l'aspect angoissant de l’œuvre et en particulier la folie meurtrière du Capitaine Achab, sans même parler de l'immensité de l'océan et de sa fureur quand il se déchaîne. Bien sûr les portraits de l'équipage du Pequod sont extrêmement fidèles à l'essence même de chaque personnage, ce qui permet de retrouver les immenses qualités littéraires de l’œuvre originale. De la traque au naufrage final, toute la dramaturgie va crescendo. Voici donc une adaptation supérieure, qui plaira aux lecteurs d'Herman Melville comme à ceux du 9ème art car les peintures de Sienkiewicz vont bien au delà du registre strict du comics. Un must have, tout simplement !