L'histoire :
Il était une fois... A l'aube des temps de ce monde... Rinlong venait tout juste d'enlacer ses deux aînés lorsqu'un dieu foula le premier ces terres nouvellement engendrées. Celui-ci n'avait ni forme ni figure et contrairement à ses frères et sœurs célestes, il avait adopté un gabarit minuscule. Ainsi, il entendait exploiter au maximum les possibilités que lui avait octroyées Hînim. En l'espace d'une éternité et d'un instant, il se résolut à prendre une forme nouvelle. Les contours d'une silhouette s'esquissèrent. Apparurent d'abord les membres supérieurs complétés à leur extrémité par des moignons sur lesquels poussèrent quatre longs doigts.Puis des membres inférieurs au profil arqué au bout desquels se développèrent d'imposants sabots. Enfin une tête prit forme à la terminaison du cou. Sur les côtés, bourgeonnèrent deux oreilles duvetées. Sa peau se façonna d'écorces, de lianes et de racines. Ses poils, modelés de feuilles d'arbres, se hérissèrent. De ses tempes jaillirent deux excroissances osseuses dessinant une majestueuse ramure. A la fin, trois yeux lactescents, capables de tout voir, s'ouvrirent sur ce désert qu'était encore le monde...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Créer un univers de toutes pièces est un pari audacieux. Mais faire en sorte qu'il repose sur une mythologie a quelque chose d'un peu dingue. Josselin Billard a pourtant relevé le défi et si on en juge par ce tome 2, haut la main ! Les contes du Givre recèlent en effet quelques petits trésors. Ceux-là même que l'auteur a eu à cœur d'écrire, lui qui débuta comme dessinateur et se découvrit l'envie d'écrire ses propres histoires. Dans sa postface, il nous livre aussi un peu des difficultés qu'il a eues, enfermé (comme tout le monde) par le confinement... Alors ce qui constituait une difficulté supplémentaire a agi comme un multiplicateur d'envie, puisque sa série se base en grande partie sur la nature (rappelons pour ceux qui ne l'ont pas lue que les personnages sont des animaux). Et son amour déclamé pour la nature est parfaitement traduit par le contenu de ses Contes. A l'instar de ceux provenant de la Crypte, le lecteur se découvre, fable après fable, aussi excité et curieux que les marmots-animaux à qui s'adresse la Baba, cette veille taupe bienveillante mais un brin farceuse qui épouse la voix du narrateur. Impossible d'autre part de passer sous silence le second pilier de la série : la mythologie. Josselin Billard a inventé un monde, son histoire et ses dieux, dont on trouvera des renseignements supplémentaires et un «ordre» aux notes de fin d'album. L'écriture est épique et jamais ampoulée, parfois même poétique. Elle nous emporte et ce second volet réserve aussi des surprises visuelles, puisque l'auteur s'essaie à nouveau à des styles graphiques et des techniques très différentes, ce qui donne un panel réussi de dessins, sans que l'ensemble ne soit non plus disparate. Mention spéciale aux couleurs, qu'il signe également, avec la participation de Czek et Rackham , l'ensemble des tons s'avérant en parfaite harmonie. Les Contes du Givre ont pour eux l'originalité et la beauté, sans parler de la belle édition concoctée par Komics Initiative (une marque de fabrique, assurément). L'ère du Givre continue, qu'on se le dise haut et fort !