L'histoire :
Maggie Chascarillo, la blonde, vit dans un petit appart miteux avec Hopey Glass, la brune. Aujourd'hui, Maggie part bosser dans le désert pour une petite compagnie de mécanique. Là elle fait connaissance avec le beau Rand Race, le mécano prosolaire. Toute l'équipe va partir en déplacement en Zimbodia, pays imaginaire en guerre du bout du globe, où un vaisseau s'étant écrasé sur un dinosaure, dans la jungle de Zhato, doit être réparé. C'est par le biais de ses lettres à Hoppey que l'on vit ce premier voyage de Maggie, et une fois rentré(avant de repartir plus tard pour Rio Frio), on va suivre leurs aventures de cœur, tandis que la tante de Maggie- Rena Titanon- catcheuse star, essaie d'échapper à d'anciennes relations toxiques. De son côté, Pénélope (Penny) Century, mannequin blonde, trimballe son désir de super héroïne auprès de son amoureux transi : le magnia milliardaire Hervé Costigan. Dans la deuxième partie, Maggie et Rena sont portées disparues lors d’une explosion sur le site de Chepan, seul Rand Race est retrouvé sauf. Tout cela sur fond d'emplettes dans les boutiques et de concerts punk rock lorsque les copines sont en ville...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Comment ne pas user de superlatifs en parlant de Love and Rockets ? Il s'agit d'une série débutée en 1981 sous forme de fascicules auto édités, rapidement pris en charge par Fantagraphics aux États-Unis, dans laquelle, principalement, les deux frères Hernandez Jaime et Gilbert (Béto) ont parallèlement publié leurs univers respectifs. La série continue toujours, après quelques années seulement d'interruption (1997-2000), et même si chacun a désormais son propre comics, on ne parle pas de mini série, devenu un peu la mode aujourd'hui dans les comics. C’est bien un univers global, nous faisant voyager dans l'intimité de jeunes femmes, dans des ambiances et atmosphères défiant l'imagination, sur des centaines d'épisodes. Que ce soit dans les influences auprès desquelles a pu puiser Jaime Hernandez, comme celles, seventies, du Moebius Arzach par exemple (l'épisode « Comment tuer un » est flagrant), celles du roman ou du cinéma d'auteur, pouvant produire des chapitres cultissimes comme « Les 100 chambres », où, invitées par le milliardaire en vacance, les copines vont profiter de sa villa privée gigantesque, dans laquelle elles vont se perdre et vivre des aventures fabuleuses, ou bien encore dans celles qu'a pu avoir l'auteur, par exemple sur Mark Schultz, dont les Xenozoïc Tales débutées en 1988 ont joué à fond le côté pépée, rock et dinosaures, avec un dessin tout aussi majestueux. Tout est prétexte à de superbes cases où l'encre noire nous charme, déroulant des aplats, des formes géométriques, des silhouettes, qui resteront gravées longtemps dans l'iris du lecteur. Sans compter la poésie et l'intelligence intrinsèque de ces planches, à l'écriture jamais vue à l'époque et quasiment jamais revue depuis. Jaime Hernandez a créé avec Love and Rockets une esthétique qui n'appartient qu'à lui, et s'il est culte dans le milieu rock, c'est parce qu'en dehors de sa propre appétence pour le punk rock, il a su capter l'essence de toute une génération, et au delà, créer de vrais icônes de papier, majoritairement féminines, reprises à l'envie, adaptées ou telles quelles sur des affiches de concert, underground la plupart du temps. La BD féministe numéro une ! Love and Rockets volume 1 est une bible du comics alternatif portant très haut le niveau du médium, et ne pas l'avoir dans sa bibliothèque, c'est comme ne pas avoir Sticky Fingers dans sa discothèque rock. Un sacrilège, rien de moins, d’autant plus que des bonus sont inclus : une préface de Frederik Peeters, une postface « L'héritage des comix underground » 1ère partie par Marc Duveau, et une interview avec Jaime et Gilbert Hernandez par Gary Groth et Robert Fiore. On lira avec autant d'intérêt et de plaisir le premier volume des récits de son frère Gilbert, rassemblés dans Love and Rockets Heartbreak Soup, paru simultanément, et on guettera la sortie des prochains tomes !