L'histoire :
Un jour de 1949, Joan Fischer rapporte à la maison un jeu d’échecs acheté 1$ dans une boutique. Sa mère Regina et son frère Bobby s’en étonnent et apprennent benoitement les règles. La famille monoparentale vit alors chichement, dans un appartement de Brooklyn. Regina lutte chaque jour pour joindre les deux bouts. En 1951, Bobby traîne sa mère à l’intérieur d’une salle où se déroule un championnat d’échecs. Le gamin a alors l’occasion de faire une partie avec des joueurs confirmés. Il perd la partie, mais la maturité de son approche incite Carmine Nigro, le président du club d’échecs de Brooklyn, à lui proposer d’intégrer leurs soirées d’entrainement. Les mardis et jeudis soirs, Bobby Fischer apprend ainsi à gagner en maturité dans ses ouvertures et ses stratégies. Les échecs tournent dès lors à l’obsession chez l'adolescent. Il ne fait plus que ça, il achète des tas d’ouvrages spécialisés, il délaisse ses devoirs scolaires… Carmine Nigro insiste néanmoins pour encore accentuer le génie qu’il a décelé en lui, en l’incitant à participer à des tournois…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Qualifié de « meilleur joueur d’échecs du monde » par Garry Kasparov, l’américain Bobby Fisher fut effectivement sacré champion du monde de la discipline en 1972. Un titre qui sonna comme une victoire suprême sur l’URSS, nation alors maîtresse des échecs, en pleine guerre froide. Un titre unique, d’ailleurs, car ce génie des échecs se fit aussitôt oublier et sombra dans la démence. Son destin peu commun inspira les scénaristes de Netflix® pour la conception de la série à succès, Le jeu de la dame, qui n’eurent qu’à féminiser le personnage et à en modifier ses « déviances sociales ». Car si le génie de Fisher est incontestable, il semble que la partie de son cerveau qui lui a servi à optimiser les stratégies sur un échiquier a aussi délaissé le minimum syndical pour adopter une maturité politique et un comportement sociable. Il meurt en 2008, apatride, en Islande, dans le dénuement financier et affectif, abruti de conspirationniste et d’antisémitisme. Une chute moche pour un type génial mais détestable, tout va bien ! Scénarisée par Wagner Willian, cette biographie chronologique et complète s’en tient assez platement aux faits. Elle débute subtilement, en parvenant à expliciter le déplacement de chaque pièce à mesure qu’elle développe l’enfance de Fischer. En revanche, elle ne parvient pas à nous faire comprendre en quoi l’approche de Fischer a révolutionné les échecs (une gageure pour les profanes). Le dessin réaliste en noir, blanc et lavis de gris, signé de Julian Voloj, est tout aussi académique, propret, sage et peu attachant que l’était ce « monstre ».