L'histoire :
Une jeune femme de forte corpulence marche sur un trottoir le long d’un grand mur. D’une anfractuosité régulière, s’échappe un souffle intriguant. Il y a comme des petits éclairs, une énergie, le cœur de quelque chose de puissant qui la pousse à pénétrer dans la faille. La jeune femme avance jusqu’à toucher de ses mains cette espèce de tourbillon. Elle se sent alors investie d’une force naturelle qui dépasse l’entendement. Elle se sent cyclone, chaos, maelstrom, comme si elle faisait un tour dans une gigantesque machine à laver, explosive et implosive en même temps. Surtout, elle perd le contrôle de ses mains, qui deviennent des outils titanesques, avec des doigts et des muscles démultipliés, herculéens, absolus. Le lendemain matin, quand elle se réveille dans sa chambre à coucher, sa mère lui apporte son petit-déjeuner au lit. Elle a des dizaines de doigts élastiques qui virevoltent dans tous les sens, impatients de trouver une activité à la mesure de leurs besoins démiurgiques. Impossible de s’emparer d’un verre d’eau sans qu’il se brise sous la force de ces mains démentes. Impossible d’attraper de la nourriture : elle se disloque et disparait en poussière. Et que dire de la bouilloire, du pauvre grille-pain et de feu l’antique téléphone à cadran…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Sans qu’on sache ni pourquoi, ni comment, une jeune femme de forte corpulence bénéficie à la fois d’un super-pouvoir et d’une malédiction avec ses mains. Ses mains à la fois métamorphes, élastiques et herculéennes, deviennent des outils magiques, méga-puissants, au service de tous ses désidératas. Elles coupent des arbres, concassent la pierre, en extraient les métaux par simple compression… Bref, cette jeune femme est devenue l’équivalente d’un dieu. Cela permet à l’autrice américaine Lale Westwind de dessiner des tas de séquences dans lesquelles tout virevolte, se démultiplie, explose… sans qu’on comprenne très bien le cœur du propos de cette histoire entièrement muette. A part une ode à l’outil numéro 1 qui a permis à l’être humain de devenir ce génial générateur de progrès (et bientôt destructeur de son propre écosystème), il n’y a pas (trop) de construction d’intrigue. Au cours de débauches d’énergie sans cesse réitérées, la jeune femme enchaine les expériences initiatiques et les créations avec ses mains fofolles. Elle répare un moteur d’avion, saute sur des montagnes, fabrique une maison, puis une moto en cailloux, communique avec des nuages qui prennent des apparences vaguement humanoïdes… La colorisation se borne à des déclinaisons des teintes de base CMJN (surtout magenta), pour un rendu on ne peut plus psychédélique. A lire tout en inhalant (ou mangeant) une substance prohibée. Méfiez-vous alors de vos mains.