L'histoire :
Il se souvient difficilement de ce qu’il était, de ce qu’il s’est passé et de toute sa vie antérieure. Comment d’ailleurs réfléchir et analyser dans ce monde étrange aux couleurs vives, sans véritable civilisation ni construction familière ? Peut-être que c’est un rêve ? Peut-être une hallucination ou son esprit qui imagine quelque chose ? Alors, pour retrouver la raison, il se répète inlassablement qui il est : « Je suis Stephen Strange. Je suis médecin ». Petit à petit, la mémoire lui revient mais toujours de façon opaque, comme si la vérité portait un voile et se cachait derrière. « Je suis Stephen Strange. Je suis médecin ». Il était au volant d’une voiture et ça s’est mal terminé. « Je suis Stephen Strange. Je suis médecin ». Sa voiture est sortie de la route puis il ne se rappelle de rien. « Je suis Stephen Strange. Je suis médecin ». Le décor étrange semble se tordre autour de lui. L’arbre, à l’écorce d’une couleur irréelle, se tord et se change en une sorte de dragon à la voix caverneuse. « Je suis Stephen Strange. Je suis médecin ». Des esprits incandescents lui parlent et évoquent leurs enfants disparus. Pas d’explication, pas de sens. « Je suis Stephen Strange. Je suis médecin ». Il sait aussi qu’il est plus que cela. Il est aussi magicien, le plus grand. Il décide alors d’utiliser son œil d’Agamatto pour en savoir plus sur l’endroit où il se trouve. Le soleil rouge semble prendre la forme de l’œil magique avant que la réalité se divise en trois noirs et béants…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Voici un Doctor Strange que vous n’êtes pas prêt d’oublier. Tradd Moore choisit, comme premier comics en auteur complet, le fameux super héros Strange. Un choix particulièrement judicieux car, avec les pouvoirs magiques infinis du personnage, on pouvait tout imaginer, et même au-delà. Préparez-vous à un voyage jamais entrepris, dans une réalité étonnante et totalement irréelle. A mi chemin entre le conte, l’héroïc-fantasy et la légende, Moore imagine une plongée dans une genèse de l’univers ultra ambitieuse et totalement décoiffante. Cette fois-ci, ce n’est pas un tour de magie du personnage mais bien une véritable descente en chute libre dans l’inconnu. Un tour de force remarquable. Si ce voyage lunaire n’a rien de confortable pour le lecteur, pauvre pantin perdu dans un monde dont il ignore même le nom, il n’en reste pas moins fascinant. On s’y perd et on bascule dans le démentiel mais cette expédition d’un autre genre est à prendre comme une expérience surréaliste. Le graphisme si particulier de Moore réalise ce miracle de transformer la réalité, de changer les codes du réel et de tordre le visuel jusqu’à ce que votre rétine explose dans un inconnu illisible, indicible, incompréhensible. Quelle poésie dans ces planches à la Philippe Druillet, quelle beauté effroyable dans ces corps tordus à la Salvador Dali, quelle maestria et quelle audace ! Le grand format rend bien hommage à ce travail gigantesque, cette plongée de l’absurde et ce graphisme révolutionnaire. Avec les couleurs psychédélique de sa compagne, Moore réinvente les super-héros en explorant des contrées jamais vues auparavant !
