L'histoire :
L’avantage des livres en papier, c’est qu'ils s'enflamment facilement. Un peu de pétrole, une allumette et tout s'embrase... même le corps humain. C’est le travail des pompiers pyromanes de brûler les ouvrages, les maisons et même les lecteurs récalcitrants. N’oublions pas, la lecture est interdite et toute personne qui ne respecte pas cette loi sera sévèrement punie. Pourquoi, d'ailleurs, vouloir se plonger dans un bouquin, quand l'état fournit déjà tout le divertissement nécessaire. On peut rester chez soi et profiter de spectacles sur des écrans géants avec des programmes gentils et drôles. Ainsi les gens n’ont plus à se poser de questions sur absolument rien. Plus de questions, plus d’interrogations et tout le monde devient un brave mouton docile. Surtout pendant un conflit militaire. Montag rencontre une jeune fille et il apprécie discuter avec elle. Quelques mots échangés suffisent à remettre en question toute son identité et sa besogne. Cela s'amplifie au terme d'une journée de travail très difficile. Il a vu une femme s’immoler avec sa maison et ses livres. En rentrant chez lui, il essaie d’en discuter avec son épouse. Elle ne l’écoute pas. Il est désespéré de cet enfermement d’esprit et lui demande s’il sait où est passé la demoiselle du bout de la rue. Elle lui dit d’un ton détaché qu’elle est morte. Lui sait qu’on l’a tuée car elle dérangeait... Cet évènement le pousse à se poser des questions. Son supérieur se doute de quelque chose. En plus, il sait qu’il a ramené des bouquins chez lui. C'est le début de la fin, car une fulgurance de lucidité va tout faire basculer. Jusqu'où cela peut-il l'emmener ? Un retour en arrière est-il possible ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Raymond Douglas Bradbury, dit Ray Bradbury (1920 - 2012) a marqué l’histoire de la science-fiction avec son roman dystopique Fahrenheit 451 (publié en 1953). A travers celui-ci, il critique avec ardeur l'émergence de la culture de masse qui met la distraction au sommet de tout, à l'opposition de la connaissance. Le récit prend aujourd'hui une nouvelle forme via l'adaptation sous forme de comics de Tim Hamilton. Ce dernier a déjà a son actif l'adaptation du roman de Stevenson Treasure Island. Et la collection de Phileas avait précédemment proposé Le meilleur des mondes d'Aldous Huxley (par Fred Fordham). Le choix est judicieux au regard de la force du texte et surtout de sa dimension intemporelle. Dès les premières pages, on se laisse porter par la narration fidèle au livre. Progressivement, on accompagne Montag dans ses interrogations. Il passe du conformisme – suivre les ordres sans réfléchir – à une prise de conscience. Beaucoup de lecteurs pourront se reconnaître dans ce cheminement. Parfois, il suffit d'une rencontre, d'une discussion pour insuffler la graine de la remise en question. Cela permet aussi de réfléchir à l'actuel accès au pouvoir de dirigeants radicaux. L'effacement du savoir a fait ses preuves dans l'Histoire, les exemples ne manquent pas (y compris au XIXème siècle...). La censure comme méthode de contrôle, du pain et des jeux, du divertissement facile. La préface accorde crédit et reconnaissance. Au niveau graphique, c'est très sage et classique, loin des œuvres indés ou hardboiled. Néanmoins, la noirceur est toujours plus prégnante. La lumière n'apparaît que dans une forme de déchéance. Une approche étonnante qui donnera envie de lire ou relire l'œuvre originale.