L'histoire :
Parce qu’il ne savait pas trop quoi faire dans la vie et qu’il voulait que son père, soldat multi-récompensé pendant la seconde guerre mondiale, soit fier de lui, Clayton s’est engagé comme simple trouffion au Vietnam. Le voilà en 1970, en train de patrouiller avec ses camarades dans un secteur hyper dangereux. Ils traversent une rizière vers un village ennemi, lorsqu’une balle de sniper embusqué traverse le crane de son sergent par derrière, lui arrachant tout le visage. Une évacuation sanitaire est demandée, le reste de la section passe à l’attaque. Ils n’y trouvent que des femmes, des enfants et des vieux. Les GI américains violent, torturent et incendient les huttes. Clayton est encore un tendre, il est plus spectateur qu’acteur de ces exactions de guerre. La patrouille continue. Ils découvrent à présent une collection de têtes de GI plantées sur des pieux alignés. S’ensuit une pluie de mortiers et une demande radio de soutien aérien. Après l’intervention des hélicos et du napalm, ils entament l’ascension de la colline où se trouve le bunker ennemi. Le bunker est facilement neutralisé, mais la nuit suivante, une horde de vietcongs leur tombe sur le râble. Tapi dans un bosquet, Clayton voit tous ses camarades se faire dégommer les uns après les autres. Le rapport de force est déséquilibré, ils vont tous y passer. Il est d’ailleurs déjà le dernier survivant. Il va être découvert : un vietcong s’approche de son bosquet, mitraillette au poing. Soudain, un commando allié intervient avec une redoutable efficacité. Dans un indescriptible chaos de feu, mais aussi d’armes blanches et de grenades, les vietcongs sont éradiqués. Clayton a juste une éraflure au ventre. Il s’apprête à remercier ses providentiels sauveurs, lorsqu’il s’aperçoit qu’il s’agit d’une section de… sept chimpanzés !
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le jeu de mot astucieux du titre – guerillas pour gorillas – sied admirablement au pitch qui résume ce comics de guerre. Car ici, une section expérimentale de singes est envoyée sur le front du Vietnam en 1970, afin de « buter du jaune ». Le singe comme arme absolue, une idée saugrenue ? Pas tant que ça, si l’on considère que la jungle est l’environnement familier des singes et que, tout aussi naturellement, l’espèce se livre déjà à l’état sauvage à des guerres meurtrières de territoires. Nous voici donc dans un Platoon revisité à l’aune de la Planète des singes ou de l’Ile du docteur Moreau. Ce premier épais volume contient les 6 premiers comics parus aux States, réalisés tout en noir et blanc à l’encre de chine. Le dessin semi-réaliste de l’auteur complet Brahm Revel est incisif. Ses automatismes évidents accompagnent le dynamisme nécessaire lors des nombreuses altercations entre GI (qu’ils soient humains ou simiesques) et vietcongs à chapeaux pointus. Car ça canarde sévère, ça explose énormément, ça étripe, ça déchiquète, ça défouraille. Si la couleur avait été permise, la teinte rouge du sang aurait fini par prendre le dessus sur le vert de la jungle, qui sert de décor permanent (avec quelques galeries). Nonobstant, cette action pure s’accompagne d’une question de fond sur la condition animale. Certes, l’intelligence de ces singes a été génétiquement améliorée pour optimiser l’utilisation des armes et des tactiques humaines ; mais de par leur filiation darwinienne, l’homme et le singe semblent partager la même aisance martiale. En outre, la psychologie des personnages n’est pas si caricaturale qu’elle aurait pu l’être. L’auteur s’est visiblement documenté pour éviter les clichés faciles et offrir une juste immersion. Le comics est en cours de réalisation, cet opus nous laisse d’ailleurs cruellement en plan. Un second recueil devrait vraisemblablement être importé par les éditions Robinson.