L'histoire :
La tête cryogénisée d’Adolf Hitler a été récupérée dans l’espace par les néo-nazis du vaisseau Inifinity Eight. Ils l’ont aussitôt implantée dans le liquide amniotique d’un robot de probation, où le cerveau a été réactivé et où toutes les données historiques y ont été réinjectées. Or, la force de caractère et le désir de vengeance du führer sont tels, qu’il prend le contrôle du robot pour assouvir sa volonté. D’un violent coup de poing, le Führer écrabouille alors l’un des clones de Rudolf Hess. L’agent Moonkicker est désorientée… Doit-elle neutraliser ce robot qui, jusqu’à présent, la surveillait ? Hitler la persuade au contraire du bien-fondé de sa révolte. Car en ayant accès aux données du vaisseau, il a découvert que les 8 postes clés qui le dirigent appartiennent tous à des races extraterrestres issues de la galaxie d’Andromède. Rien n’a été confié aux peuples de la voie lactée, c’est un scandale ! Hitler propose à Moonkicker de l’accompagner dans la refondation d’un Reich établi autour de la culture, des valeurs et de l’art de vivre du nazisme. En plein doute, Moonkicker accepte. Le robot-Hitler entreprend aussitôt de faire un vibrant discours à travers les haut-parleurs du vaisseau pour mobiliser les classes populaires…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le retour de Hitler est un vieux fantasme facho, qui a jadis beaucoup nourri les thrillers ésotériques de série B. Il n’y a donc rien d’illogique à ce que le projet-concept Infinity 8 s’empare de cette mythologie, lui qui s’est justement accordé pour vocation un bon gros délire de série B, option space opéra. Sous les crayons expert d’Olivier Vatine (et un peu les pinceaux de son épouse Isabelle Rabarot) et dans un décorum artistique que l’auteur apprécie tout particulièrement, les co-scénaristes Lewis Trondheim et re-Vatine poursuivent donc la réanimation surprise du Führer au sein du vaisseau interstellaire éponyme. Ce retour est d’autant plus à contre-emploi qu’à cette époque futuriste, le nazisme semble s’être débarrassé de son idéologie absolutiste pour devenir un art de vivre quelque plus feng-shui. Cela dit, le Führer, lui, n’a rien perdu de sa fureur (on a le droit aux jeux de mots pourris, puisqu’on est dans de la série B). En trois coups de cuillères à pot et en à peine 10 minutes, Hitler refonde un Reich de robots pour « épurer » l’Infinity Eight de ses populations hors voie lactée. Si le ton délirant perdure, notamment à travers des répliques décalées (« Finalement, il a bon fond, ce monsieur Hitler »…), la tonalité se fait donc tout de même plus inquiétante. Il semble en effet qu’il soit plus aisé d’instaurer le fascisme que de l’éradiquer… Quelques-uns trouveront dans ce scénario de quoi nourrir la métaphore avec notre époque anxieuse : à propos des techniques de lavage de cerveau, des théories anti-conspiratrices, du refus des contre-cultures ou des réflexes de repli identitaire. Mais n’oublions pas que Infinity 8 est avant tout un bon gros délire de SF (cf. la grille annexe de mots croisés)…