L'histoire :
La Créature des Marais a sauvé le monde au péril de sa vie après avoir mené un combat titanesque. Même si les humains ont frôlé l'extinction, ils poursuivent leurs vies sans avoir conscience de ce qu'ils doivent au héros végétal. Pire, ils décident de faire un procès à sa femme, Abby, car leur union est jugée contre-nature. D'une certaine façon, pour eux, c'est comme si leurs épouses avaient une relation charnelle avec un brocoli ou une salade ! Paisible et pacifiste, n'utilisant le pouvoir de la sève qu'avec parcimonie, le monstre recouvert de verdure devient alors fou de rage et déverse les forces de la nature sur la cité qui la détient prisonnière : Gotham. Les rues d'ordinaire si sombres de la cité deviennent alors des jungles luxuriantes recouvertes de lianes et d'espèces végétales en tout genre. La créature pose un redoutable ultimatum en exigeant la libération imminente de son aimée mais devant le refus catégorique des autorités, elle décide d'intensifier son attaque. Cependant, s'en prendre à Gotham c'est prendre le risque de croiser le chemin de son célèbre protecteur, un certain héros déguisé en chauve-souris...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Indisponible depuis bien trop longtemps dans les rayonnages des librairies, Urban comics continue sa politique éditoriale de réédition des œuvres d'Alan Moore. Avec ce dernier volume une fois encore bien épais, l'éditeur met un point final au travail de l'immense scénariste anglais sur la Créature des Marais. De simple personnage monstrueux d'histoires horrifiques, Moore aura en plus d'une quarantaine d'épisodes totalement redéfini la psychologie et la destinée de ce héros si particulier. Bien loin de ses marais, la créature va ici croiser la route des personnages de l'univers DC et montrer un visage bien différent de celui des épisodes précédents. En amateur averti des grands noms de la littérature fantastique comme H. P. Lovecraft ou bien Marie Shelley, Alan Moore imagine des histoires en forme d'hommages respectueux. Toujours très littéraire et engagé dans son propos, il n'hésite pas cette fois à donner à son récit une orientation très psychédélique et exigeante qui pourra désarçonner un bon nombre de lecteurs. Le graphisme, quant à lui, reste fidèle aux épisodes précédents avec son rendu forcément un peu daté mais qui reste très agréable avec un encrage volontairement poisseux et chargé mais aussi des déstructurations de planches clairement avant-gardistes. Certaines pleines pages sont incroyables et ne sont pas sans rappeler les travaux précurseurs de Philippe Druillet. Avec cette série, Alan Moore a donné au monde du comics une nouvelle orientation plus mature, littéraire et politisée qui s'est concrétisée pendant des décennies sous le label Vertigo.