L'histoire :
On ne peut pas dire que Rubin est un perdreau de l’année car il est aussi un démon millénaire datant de l’épopée hindoue du Mahabharata, connu sous le nom de Bakasura. Ce démon, connu pour manger sans satiété et sans vraiment regarder (ce) qui compose l’assiette, fut pourtant tué par le héros Bhima si l’on en croit la légende. Cependant, c’est bien lui qui se balade avec un élégant panama sur la tête dans les rues de l’Inde, à la recherche d’un vidéaste pour documenter l’art de la préparation de ces plats ancestraux. Il recrute alors Mohan, jeune Indien paumé, qui voit là une opportunité de se faire de l’argent en pratiquant une passion qu’il avait abandonnée. Les deux compères mal assortis vont alors partir en road trip culinaire et Rubin en profite pour coucher sur la pellicule autant de vieilles anecdotes de sa riche vie que de recettes indiennes appétissantes. Mais ceux-ci sont contrariés dans leur plan par un duo de tueurs qui semblent en vouloir à la vie de Rubin.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avec Le dernier festin de Rubin, l’auteur d’origine indienne continue de nous conter des histoires issues des légendes de son pays d’origine. Après les formidables These Savage Shore (récit vampirique fascinant) et le carton de l’année 2023 Toutes les morts de Laila Starr ; Ram V nous propose une nouvelle histoire mêlant folklore et culture gastronomique indienne. C’est peu dire que l’Inde regorge d’autant de mets appétissants que de récits et contes fabuleux. Ram V découpe alors son récit en chapitres liés à des recettes qui permettent à Rubin d’y associer ce qui semble être un conte ancien pour le jeune Mohan, mais qui en réalité ne sont que des souvenirs pour le démon ancestral. Le dernier festin de Rubin se lit avec délectation et fait saliver (les recettes sont détaillées et tout à fait réalisables) autant qu’il nous emporte avec ses fables. On déambule dans les différents paysages de l’Inde grâce aux dessins faussement barbouillés de Filipe Andrade, déjà à l’œuvre dans Toutes les morts de Laila Starr. Son style en apparence brouillon, à l’opposé de la ligne claire, fait presque sentir les saveurs des plats tout en faisant de Rubin un être aussi débonnaire qu’effrayant et difforme. L’ensemble est une belle œuvre originale et poétique sur la transmission des traditions et se démarque de la production du comics américano-super-héros-centré. Je vous laisse, mon Daal Fry est prêt !