interview Comics

Alan Martin

©Ankama édition 2011

En créant Tank Girl en 1988, avec son compère Jaime Hewlett (devenu depuis membre-designer du groupe arty-musical Gorillaz), Alan Martin a donné vie à l'une des icônes les plus déjantées du 9e art. Entre anarchisme, sexualité et critique du tatchérisme, la série fut tellement marquante qu'elle eu droit à une adaptation cinéma (assez ratée). Sans nouvelle de Tank girl durant plusieurs années, c'est finalement en 2007 que le scénariste a relancé son héroïne dans de nouvelles aventures (merci Ankama). Nous avons profité de la présence d'Alan Martin au festival d'Angoulême pour converser avec lui de l’étonnant retour de la punkette et de son acolyte Booga le kangourou, et de l'avenir de la série…

Réalisée en lien avec les albums Tank Girl T6, Tank Girl T1
Lieu de l'interview : Festival d'Angoulême

interview menée
par
23 mai 2011

Bonjour Alan, peux-tu te présenter ?
Alan Martin : Je m'appelle Alan, je suis le scénariste de Tank Girl et j'ai été amené à faire Tank Girl quand j'étais au lycée avec mon ami Phillip (Bond), dessinateur et ami de Jaime Hewlett, un autre artiste de comics. Ensembles, au lycée, on a produit le fanzine en utilisant le photocopieur du lycée, qu'on a vendu à des amis et sur des festivals de BD en Angleterre. L'une des personnes à qui on l'a vendu nous a fait rentrer dans le métier en nous publiant dans le magazine Deadline. Des comics, la musique, les interviews et Tank Girl ont fait la renommée du magazine.

Quelles ont été les influences pour Tank Girl ?
Alan Martin : Principalement la musique, les groupes de pop. C'était la musique qu'on écoutait, ce à quoi ils ressemblaient et leurs attitudes. Il y avait Strange days, une revue américaine elle aussi, faite par les créateurs originaux de Deadline et deux autres personnes, Peter Milligan et Brandon McCarthy. Peter Milligan est un scénariste de comics et Brandon McCarthy un illustrateur anglais renommé.

Pourquoi la série s'est-elle arrêtée ?
Alan Martin : Cela nous amène au film que personne n'a aimé, que nous n'avons pas aimé, que les fans n'ont pas aimé. On pensait vraiment que la série était morte. Et puis Titan, l'éditeur anglais, a édité une anthologie contenant tout ce que l'on a fait, et cela s'est bien vendu. Donc, j'ai pensé faire quelque chose de nouveau. Jaime, à cette époque, était occupé sur Gorillaz avec Damon Albarn, donc j'ai du chercher un autre dessinateur. J'ai rencontré Rufus Dayglo, qui est maintenant l'artiste principal de Tank Girl. Lui m'a présenté Ashley Wood. Ashley était un fan de Tank Girl depuis longtemps, quand il était au lycée. Il était très enthousiaste et l'aventure a redémarré.

Les univers d'Ashley Wood sont pourtant très différents de ceux de Jaime Hewlett...
Alan Martin : Dans un premier temps, on devait faire ce qu'Ashley Wood voulait en faire. On voulait l'interprétation de Wood de l'univers de Tank Girl. Quand j'ai lu ses comics, j'ai su qu'il était pourtant très loin de l'univers original de Tank Girl. Il était très influencé par les dessins de Jaime Hewlett. Quand je l'ai rencontré, son style était très particulier et il voulait garder son style… alors je l'ai laissé faire pour voir ! Finalement, j’ai été très content du résultat. Il s'est servi de ses influences pour se rapprocher des comics originaux, mais sans les imiter, sans les copier. C'était parfait, juste parfait. Quand Rufus est arrivé en tant qu'artiste, il a apporté de plus en plus d'éléments dans le comic, ce que les fans aimaient vraiment, et « ça l'a fait » !

As-tu d'autres projets que Tank Girl ?
Alan Martin : J'ai bien des projets, j'y pense souvent, mais ils sont longs à produire. L'un d'entre eux est avec un ami avec qui je travaillais sur Deadline, il m'a donné plusieurs idées… Mais principalement, pour le moment, c'est Tank Girl ! Beaucoup, beaucoup de Tank Girl ! Avec beaucoup d'artistes différents aussi : on travaille avec Rufus, on a travaillé avec Ashley, on a fait un comics avec Mike Mac Mahon, un autre artiste anglais connu qui a travaillé chez 2000.AD (il a été un des premiers artistes sur Judge Dredd). C'est principalement du Tank Girl, mais en ouvrant les horizons, en apportant de plus en plus de différents styles.

Au final, penses-tu avoir des limites sur Tank Girl ?
Alan Martin : Quand la censure est concernée et que pour l'éditeur tout semble aller, si ça peut aller dans le livre, je l'écris ! Tout est sujet à provocation, sujet à un challenge constant, sujet à repousser les limites de ce que l'on peut en faire. C'est l'essence même de mon travail, de faire travailler la perception qu'ont les gens sur ce qu'est la BD. C'est l'esprit même de Tank Girl.

Si tu avais le pouvoir cosmique de visiter le crâne d’un autre auteur de bande dessinée pour mieux comprendre son œuvre, qui iriez-vous visiter ?
Alan Martin : Mon artiste et écrivain favori est Daniel Clowes qui a fait Ghost World. Il a vraiment un truc spécial.

Merci Alan !