En Grande-Bretagne, les artistes ne travaillent pas tous chez 2000A.D. ou pour des éditeurs américains comme Marvel ou DC Comics. Certains travaillent pour de plus petites structures et sur des récits assez différents. Luke Pearson est l'un de ceux-là et a choisi comme terrain d'expression une formidable série destinée aux plus jeunes intitulée Hilda. Désormais tous publiés en France chez Casterman, nous avons pu évoqué avec ce jeune auteur les aventures de cette petite fille à la chevelure bleutée.
interview Comics
Luke Pearson
Bonjour Luke Pearson, peux-tu te présenter et nous dire comment tu as commencé à travailler dans l'industrie des comics ?
Luke Pearson : Je m'appelle Luke Pearson. Je viens de Grande-Bretagne. Toute ma vie, j'ai dessiné des comics mais j'ai débuté dans le métier en 2010, avec la sortie de Hildafok, le premier des livres de la série Hilda.
Quelles sont tes influences ?
Luke Pearson : Mes influences ? Ah, j'en ai beaucoup. Déjà, les Moomins, Osamu Tezuka, Astérix et Tintin qui étaient les BD franco-belges que j'ai principalement lu, enfant.
Tu as surtout travaillé sur deux titres, la série Hilda et Everything We Miss. Deux styles très différents...
Luke Pearson : Oui, Everything We Miss est un one-shot, un graphic novel destiné aux adultes tandis que Hilda est destiné aux enfants ou à tous les âges, ça dépend du regard qu'on porte sur la série.
Pourrais-tu présenter les aventures de Hilda ?
Luke Pearson : Bien sûr. Hilda est une jeune fille qui, au début de la série, vit avec sa mère dans une cabane, au milieu de la nature. Le monde dans lequel elle vit est un monde fantastique, très inspiré du folklore scandinave. Il y a des trolls, des elfes... Et la logique du monde puise sa source dans les vieux contes, combinés avec des idées à moi. J'essaie de construire ce monde fantastique à partir de plusieurs sources d'inspiration. Et, donc, Hilda vit des aventures dans cet univers, elle rencontre de drôles de créatures avant de déménager, vers le milieu de la série, dans une bourgade peuplée elle-aussi de créatures étranges.
Ton univers est particulier. Comment as tu conçu cette originalité ?
Luke Pearson : Encore une fois, une grande partie est issue de contes anciens. En particulier des histoires norvégiennes et islandaises. J'aime le fait que ces histoires sont relativement terre-à-terre, discrètes, un peu étranges mais sans réelle structure narrative. La plupart de ces histoires tournent autour du sujet sans raconter de vrai récit. Au départ, je voulais tenter de recréer cette ambiance, cette bizarrerie ambiante qui est complètement ignorée comme si tout était en vérité normal. Et j'ai essayé de faire en sorte que, quand un événement surnaturel se produit, Hilda n'est pas nécessairement surprise. Il faut que cela paraisse banal tout en réussissant à intriguer le lecteur. J'essaie de ne pas laisser l'aspect fantastique noyer le récit. Par le biais de scènes ou d'anecdotes, on voit que le monde d'Hilda est très similaire au notre et qu'il est plus ou moins régi par les mêmes règles. Il n'y a jamais d'éléments trop fantastiques : les habitants de la ville sont des humains normaux et, par exemple, il arrive que ces éléments fantastiques ne peuvent être vus que par Hilda elle-même. J'essaie juste de les garder en fond et aussi à ce qu'à chaque fois il n'y ait qu'un seul élément de ce genre. Il n'y a pas de scène où l'on voit des elfes mais aussi un géant, un chien géant [rires]. En général, c'est une chose à la fois.
Et la série se poursuit ?
Luke Pearson : Oui, je travaille actuellement sur un nouveau. Il n'y a pas de plan sur le longue terme. J'aime l'idée suivant laquelle chaque livre correspond à une idée particulière. Je n'ai pas envie d'avoir une histoire en plusieurs parties, même si c'est tentant de se lancer dans un récit de grande envergure. Mais oui, je compte encore continuer un bon moment.
As-tu lu un comic qui t'ai marqué récemment ?
Luke Pearson : Je lis en général des comics indés américains ou des mangas - celui que je lis en ce moment est plutôt à caractère historique. J'aime bien le style des années 60, 70, les trucs super-cartoony, à la Tezuka. J'aime les trucs un peu alternatifs, dans le manga, comme l'ero guro.
Aimerais-tu explorer le style plus adulte que tu as montré sur Everything We Miss ?
Luke Pearson : Oui, j'aimerais bien. Au départ, j'espérais pouvoir balancer entre les deux genres mais le succès de Hilda m'a pris de court et j'ai fini par travailler majoritairement sur cette série. Aussi parce que j'adore cette série [rires] Je voudrais continuer à explorer ces histoires plus adultes à travers des nouvelles. J'aime ce format court et je voudrais continuer à en écrire pour peut-être les réunir dans une anthologie. Mais je ne sais pas si, un jour, j'écrirais un long graphic novel dans cet esprit.
Si tu avais le pouvoir cosmique de visiter le crâne d'un autre auteur pour en comprendre le génie, qui irais-tu visiter ?
Luke Pearson : Oh. Hum. Je dirais Tove Jansson parce que, je ne sais pas. C'est mon artiste préférée et j'admire ce qu'elle a fait. Le fait qu'elle était aussi douée dans l'écriture que pour les illustrations cartoony mais aussi dans d'autres formes d'art. C'est en quelque sorte mon idole artistique donc si je devais choisir quelqu'un, ce serait elle.
Merci Luke !