Pour de nombreux fans de comics, le nom de Paul Dini a une résonance très particulière. Ce scénariste est à l'origine de la fabuleuse série animée des années 90 sur Batman, et est en plus le créateur d'un personnage devenu très populaire ces dernières années : Harley Quinn. Travaillant aussi bien pour la télévision (Lost) que pour les comics, l'emploi du temps de Paul Dini est souvent saturé. Toutefois, après une énorme attente des fans, il a pu s'octroyer quelques jours pour venir en France lors du salon Paris Comics Expo. L'occasion donc de revenir sur une carrière riche en compagnie d'un auteur aussi agréable que bavard et capable de vous fournir des anecdotes croustillantes à chacune de ses phrases.
interview Comics
Paul Dini
La traduction de cette interview a été réalisée par Alain Delaplace, une partie des questions ont été posée par Mathieu Auverdin.
Remerciements à Clémentine Guimontheil et Louise Rossignol pour l'organisation de cette rencontre.
Peux-tu te présenter et nous dire comment tu as commencé à travailler dans l'industrie des comics ?
Paul Dini : Je m'appelle Paul Dini et je suis auteur pour le cinéma, la télévision, l'animation, les comics, les jeux vidéos... Voilà ce sur quoi j'ai travaillé durant toute ma carrière. J'ai débuté au début des années 80, alors que j'étais encore à la fac. J'écrivais alors pour un studio d'animation qui s'appelait Filmation, basé à Los Angeles. Je travaillais sur les dessins animées du samedi matin. Puis j'ai travaillé pour George Lucas, sur des séries animées qu'il produisait, ce qui m'a mené à Warner Bros Animation, où j'ai passé quinze ans à écrire pour des séries comme Tiny Toons adventures, Batman, Superman, Justice League... Beaucoup de séries de super-héros DC. En même temps et encore après, j'ai écrit pour des séries télé comme Lost, j'ai créé ma propre série, intitulée Tower Prep qui a duré une saison et a été diffusée sur Cartoon Network. Et, aujourd'hui, je fais la même chose : j'écris pour de nouvelles séries, j'écris parfois des comics pour DC... Je mène ma barque comme ça : j'écris ce qui me plaît d'écrire et en ça, je suis plutôt chanceux.
Quelles sont les différences majeures entre l'écriture pour un comics et celle destinée à une série animée ?
Paul Dini : C'est assez similaire mais il y a malgré tout quelques différences. Dans chaque média, il faut en quelque sorte se comporter en réalisateur. Dans les comics, on a plus ou moins de marge de manœuvre selon l'artiste avec lequel on travaille tandis que dans l'animation, on peut vraiment donner tout un ensemble de détails, jusqu'aux angles de vue. On peut aussi se contenter de donner des indications très générales en indiquant par exemple une vague idée de l'action ou des dialogues, ce qui permet au réalisateur et au story-boarder de faire leur propre interprétation. Cette façon d'écrire convient très bien aux films, là où on peut se permettre de prendre le temps de décomposer une scène, de la répartir entre différents artistes, d'y réfléchir ; on peut prendre son temps et explorer la scène d'un point de vue dramatique. Mais, quand on écrit pour une série télé hebdomadaire, on est très contraint par le script car le planning de production est tellement chargé que le réalisateur et le story-boarder sont nettement plus dépendants du script en termes de narration et on n'a pas autant le temps d'improviser, créativement parlant. C'est un peu la même chose avec les comics : on décompose les cases d'une planche, on explique ce qui se passe... Dans certains cas, je vais laisser le dessinateur se débrouiller et réaliser la page 4, disons, où on voit un type s'enfuir, poursuivi par une voiture, et le laisser représenter cette scène comme il l'entend. Parfois, cela dit, je me dois d'être nettement plus spécifique et détailler ce que fait le héros, les dialogues. Il y a beaucoup plus de descriptions. C'est donc assez similaire tout en étant différent parce que, dans un comic-book, on se contente de passer de page en page avec, d'habitude, un nombre de pages déterminé genre 22 ou 24 à remplir et, pour une série animée, on doit garder à l'esprit le temps nécessaire pour une scène d'action, on ne peut pas trop en dire.
Dans quel média te sens-tu le plus à l'aise ?
Paul Dini : Je dirais l'animation. C'est un média extraordinaire du point de vue de la narration et je suis plus un conteur que, disons, un designer de jeux vidéos. Même si j'ai adoré travailler sur les jeux Arkham et que j'ai beaucoup appris en faisant ça, comment structurer un jeu, se mettre au service à la fois du gameplay et de l'expérience de jeu et aussi comment réaliser un jeu qui puisse plaire au public. Mais je préfère raconter des histoires, comme dans l'animation où l'on détermine un début, un milieu et une fin avant de sortir le film. Les comics s'y prêtent aussi très bien, il y a une certaine liberté, là aussi, mais, personnellement, j'aime vraiment voir mon histoire se dérouler sur un écran.
Quelles ont été tes influences ?
Paul Dini : J'ai grandi en lisant beaucoup de comics et de comic-strips. Tout ce que j'ai lu, enfant, a fini par m'influencer, d'une certaine manière. Je lisais des strips comme Peanuts, Dick Tracy, Pogo.... Des strips rigolos ainsi que des strips policiers. On recevait trois journaux, à la maison, j'avais donc la possibilité, chaque jour, de lire à peu près tous les strips publiés en Amérique. J'aimais aussi lire des comic-books comme Superman ou Batman.... Je lisais tout ce qui me tombait sous la main. J'allais dans une épicerie – à l'époque, il n'y avait pas de boutiques de comic-books – et je prenais Batman, Archie, Uncle Scrooge [NDT : Picsou], Conan... Je m'asseyais dans un coin et je les lisais tous et ça, parce que je les appréciais tous. Et j'ai fais ça jusqu'à la fac. Du moment que ça présentait un intérêt à mes yeux, j'étais pas du genre à me dire « Oh, je vais arrêter de lire Archie, j'ai 18 ans, maintenant », non, je me disais plutôt "Eh, celui-là a l'air marrant ! » et je lisais donc à peu près tout ce qui pouvait sortir. En matière de littérature, j'étais assez fan des grands classiques de la littérature enfantine : Lewis Carroll, Charles Dickens, des auteurs américains comme John Steinbeck... Des auteurs américains contemporains, aussi. J'aime beaucoup les auteurs humoristiques comme James Thurber, Groucho Marx ou Woody Allen. J'aime aussi les essais écrits par des comiques et je pense que tout ça a fini par s'immiscer dans mon processus créatif. Je n'ai pas fait que lire des polars, des histoires d'enquêtes ou de détectives. Il y en a eu, mais le fait est que je me suis efforcé de lire à peu près tout ce qui passait.
Quel regard portes-tu sur la série Batman que tu as écrit ?
Paul Dini : Je suis toujours très reconnaissant de voir qu'aujourd'hui encore il y a beaucoup de gens qui apprécient la série. Je suis très fier mais aussi très touché de voir qu'on y associe toujours mon nom. On ne se rend pas vraiment compte de ce que l'on est en train de faire, au moment où on le fait. Je travaillais sur la série en me disant « ça va être une super série, que tout le monde va adorer puis elle va disparaître et on l'oubliera dans quelques mois ». J'ai toujours eu un bon feeling, en travaillant sur Batman. Je savais qu'on travaillait sur une série de qualité mais de là à penser qu'elle perdurerait dans les mémoires aussi longtemps... C'est très surprenant et ça fait aussi très plaisir de rencontrer des fans qui ont grandi en regardant la série et qui – j'en parlais encore à ma femme, hier soir – se rappellent des titres des épisodes ! « J'ai adoré Almost Got 'Im » ou encore Heart of Ice ou Harley and Ivy... On ne parle pas de la série mais bien d'épisodes. C'est comme s'ils se rappelaient de titres de livres appartenant à une longue série, comme avec « Harry Potter et la Chambre des Secrets ». Je suis ravi que la série ait cette longévité et qu'elle ait marqué autant de gens. D'une certaine manière, j'ai pu faire ce qu'ont pu faire des auteurs comme Dennis O'Neil, Steve Englehart, Scott Snyder ou Frank Miller : laisser une empreinte très personnelle sur le personnage de Batman, au travers de certaines des histoires que j'ai pu raconter. Je suis vraiment très fier que mon nom soit associé à un tel héritage.
Dis-moi si je me trompe mais il me semble que la série animée était plus portée sur l'action alors que ce que tu as écrit pour les comic-books étaient plus axés sur les personnages. Qu'est-ce qui t'a fait passer de l'action à une étude plus poussée des personnages ?
Paul Dini : Eh bien... C'est une bonne question, on ne me l'avait jamais posée auparavant. Merci ! J'ai pris cette décision en toute conscience. Je reprenais alors les rênes de et je voulais que le titre se rapproche vraiment plus des histoires de détectives et je voulais aussi qu'on expose plus la personnalité de Bruce Wayne. Et, comme là, on a une page sur laquelle on peut inscrire plus de dialogues mais aussi s'intéresser aux pensées des personnages, je me suis dit que je pouvais raconter mon histoire sur un mode plus littéraire que je ne pouvais le faire dans la série animée où l'on doit se mettre au service de 22 minutes d'action ou d'autres règles. Par exemple... Le diffuseur de la série a été plutôt généreux avec nous, durant les toutes premières saisons de Batman mais, à mesure que la série avançait, on nous demandait de plus en plus de choses. On s'est rendus compte qu'il devenait de plus en plus difficile de faire un épisode comme Almost Got 'Im parce que le diffuseur nous disait alors « Ok, on veut plus de Robin, dans la série parce que le public est majoritairement adulte et on veut plus d'enfants devant le poste ». Avec Bruce Timm, on sortait souvent une idée très marrante : on avait une histoire où on voulait opposer Catwoman à Black Canary et le diffuseur ne voulait rien entendre « Vous ne ferez pas une histoire où on ne voit pas Robin, il nous fait plus d'enfants dans le public ». Je crois que c'est vraiment un sacré accomplissement que d'avoir réussi à placer Batgirl et Robin dans des épisodes où ils n'avaient rien à faire sans qu'ils fassent tâche pour autant et où, au contraire, ils avaient l'air d'avoir un grand rôle à jouer. Mais, cette première saison, qui nous a donné l'opportunité de jouer avec plus de thèmes adultes et d'intrigues policières s'est peu à peu effacée à mesure que le network s'est mis en tête d'attirer plus d'enfants devant leurs postes. Donc, quand j'ai commencé à écrire les comic-books, j'ai avant tout voulu m'assurer que je pourrai raconter ces histoires qui peuvent marcher aussi bien pour de jeunes lecteurs – qui pouvaient les apprécier du seul fait de la présence de Batman – que des lecteurs plus âgés – qui, eux, pouvaient alors s'intéresser plus à la personnalité de Bruce Wayne où encore, comme tu le disais, à des personnages plus développés –. Et c'était aussi tout simplement plus intéressant pour moi que d'essayer d'entrer dans la psyché des personnages et des vilains de l'histoire.
Qu'est-ce que ça te fait d'être le créateur d'Harley Quinn, un personnage devenu extrêmement populaire, ces dernières années ?
Paul Dini : C'est intéressant : l'autre jour, je me baladais dans la convention, avec mon épouse, et il y avait des stands qui vendaient des costumes d'Harley Quinn, des sacs à dos avec son effigie, des casquettes, des t-shirts... Et J'ai dit « Mon dieu, elle est devenue Mickey Mouse ! Elle est comme Mickey ! » et pas seulement ça : non seulement elle arbore les mêmes couleurs que Mickey – noir, blanc et rouge, avec un peu de jaune dans le cas de Mickey – mais c'est aussi le cas de Deadpool ! Je me demande s'il n'y a pas quelque chose dans ces trois couleurs, dans leurs formes qui pourraient t'inciter à les adopter pour rendre ton personnage populaire. Mais je suis très heureux de constater qu'elle est devenue si importante aux yeux d'autant de gens. Au départ, elle n'était que ce personnage que j'avais imaginé et inclus dans la série. Bruce lui a fait honneur en termes de design et il m'a même fallu, parfois, me battre pour l'inclure dans certains épisodes car les réalisateurs ne voulaient pas d'elle. Mais, je la défendais «« Mais si, elle est fun, met-là dans l'épisode ! ». Je crois que la série a été un très bon tremplin, pour elle. Et, entre 1992 et 2002, l'année où elle a fait son apparition dans le comic-book, elle a fait son bout de chemin dans l'imaginaire des gens au point où, après 10 ans, le public la connaissait, beaucoup avaient grandis avec elle et elle faisait partie de leur enfance. Certains ont même fini par écrire des histoires où elle figurait ou encore à l'illustrer dans des comics. C'est très cool de savoir que j'ai participé à la conception d'un personnage qui est devenu aussi populaire et qui sera encore dans les parages bien longtemps après moi. C'est ce que souhaite tout créateur et c'est très fun de pouvoir le vivre. C'est très encourageant, aussi, car je me dis que je peux le refaire.
Elle est souvent décrite comme un personnage très amusant mais, je viens de lire Mad Love et, dedans, elle m'a aussi frappé comme un personnage très triste : elle tombe amoureuse ou, en tous cas, elle est fascinée par le Joker et ce n'est pas du tout réciproque. Pourquoi a-t-elle ces deux facettes ?
Paul Dini : Avec le personnage de Harley, je voulais raconter une histoire tragique. L'univers de Batman compte nombre d'histoire tristes comme celle de Double-Face ou de Gueule d'Argile. Certains personnages versent dans le crime car ils y sont naturellement enclins, comme Catwoman, d'autres parce que ce sont des psychopathes, comme le Joker. Mais, dans le cas de Harley, il manquait quelque chose à sa vie et, quand elle a rencontré le Joker, cela a trouvé une résonance en elle. Et on se pose toujours la question de savoir si il éprouve quelque chose pour elle ou bien s'il se sert d'elle et je crois qu'il arrive que l'on s'implique dans une relation de la même manière : la personne que j'aime est idéale à mes yeux, je veux faire partie de son univers, je peux la changer, ce genre de choses. Et on perd son identité et c'est ça qui arrive à Harley. Et ce retour à une identité individuelle, celle qu'on lui connait aujourd'hui, est une très bonne chose pour elle car, dans Mad Love, elle s'efforce d'éliminer ce qui est un obstacle à son bonheur : sans Batman, le Joker serait heureux. Mais ce qu'elle ne réalise pas, c'est que le Joker est nettement plus investi dans Batman, émotionnellement parlant, qu'il ne le sera jamais vis-à-vis d'elle. Il fait une telle fixation sur Batman que, d'après d'autres auteurs, soit il le hait avec une passion incontrôlable, soit il l'aime de la même façon. Harley souhaite se débarrasser de Batman et récupérer l'intensité des émotions ressenties par le Joker pour Batman mais cela se retourne contre elle parce que c'est une fête privée, entre ces deux-là et elle n'est pas la bienvenue. Et c'est triste, au final, que le Joker aussi bien que Batman se servent d'elle. Le Joker l'emploie en tant que complice, une assistante qui le sort de prison et se charge des tâches ingrates et alors qu'elle s'apprête à tuer Batman, celui-ci la manipule et se sert d'elle pour atteindre le Joker, même si celui-ci risque de la tuer, au moins Batman pourra s'échapper et éventuellement la sauver. Mais Batman est très intelligent : il ne va pas s'interdire de la manipuler alors qu'il est dans une situation pareille et il sait comment l'atteindre... C'est tragique et, à la fin, elle recommence, juste histoire de recevoir une petite preuve d'affection de la part du Joker.
Mais certains auteurs l'ont écartée du Joker et rendue plus indépendante. Que penses-tu de cette évolution vers une femme plus forte ?
Paul Dini : Oui, je trouve que c'est positif. Je n'aurais pas souhaité que son personnage se contente de suivre bêtement le Joker, de suivre ses ordres, d'être l'objet de ses abus et de faire le ménage derrière lui. Certains des premiers épisodes que j'ai écrits, notamment un intitulé Joker's Millions dans lequel le Joker remplace Harley et, quand celle-ci s'évade de prison, elle va lui coller une raclée pour l'avoir trahie. Si j'avais continué cette histoire, je serais allé encore plus loin... Actuellement, je travaille sur une série animée de la Justice League et je l'ai faite apparaître une ou deux fois, toujours sans le Joker. C'est un personnage à part entière et elle y apparaît dans une version très proche de celle des comic-books : une fouteuse de trouble, une anti-héroïne plus qu'une criminelle. Et je crois que c'est l'angle à adopter car si on la voit trop souvent avec le Joker, cela limite aussi ce qu'il peut faire, lui. Cela met aussi en place une dynamique plus intéressante dans le sens où si je devais placer ces deux personnages, Harley et le Joker, au sein d'un épisode d'une série ou dans un comic-book, je m'amuserais alors à redéfinir leur relation, où en sont-ils à présent ? Rivaux ? Égaux ? Ce serait amusant de voir comment ça fonctionne dans un couple qui a explosé et qui doit se reformer. Ça créé une toute autre dynamique. Mais pour ce qui est de l'approche complice/femme de main, non, je pense que je ne retournerai jamais sur ce terrain-là.
Et que penses-tu de la version ciné de Suicide Squad ? Elle est très différente...
Paul Dini : Je n'en pense rien de particulier. Sincèrement, il y a tellement de versions différentes que j'ai fini par décrocher, je ne me pose plus la question de savoir ce qu'ils font du personnage. Mais c'est cool qu'elle soit dans le film et je trouve que le look pour lequel ils ont opté pour le personnage est unique et très fun. Mais à un moment, j'ai lâché prise, j'ai laissé le personnage partir vivre sa vie. D'autres auteurs vont lui écrire des aventures et l'emmener dans des directions différentes et ça me va car j'ai en quelque sorte dit ce que j'avais à dire, moi, à son sujet. Je m'amuserai devant le film quand je finirai par le voir, mais, voilà, c'est fait par d'autres et c'est leur version du personnage. Je ne vais pas m'accrocher au personnage ou dire quoi que ce soit au sujet du film vu que je n'en sais pas grand chose.
Tu as écrit de nombreux récits marquants de Batman mais est-ce que, pour autant, tu n'as jamais souhaité travailler sur d'autres personnages ou encore pour d'autres éditeurs ?
Paul Dini : Oh, du genre Marvel ?
Par exemple. Ils t'ont approché ?
Paul Dini : Oui, ils sont venus me voir et, d'ailleurs, il y a trois ans, j'ai travaillé avec Marvel Animation, pour développer les séries Spider-Man et Hulk qui sont actuellement diffusées aux Etats-Unis. J'ai aussi travaillé pour Disney, pour leur chaîne Disney XD, plus précisément. À l'époque, je voyais fréquemment Joe Quesada qui m'a cordialement invité à venir, quand je le souhaitais, écrire quelque chose pour Marvel Comics. Je n'ai pas donné suite, à l'époque, car j'étais très occupé par les deux séries et je ne voulais pas me surcharger de travail. Il fut un temps où j'ai fait ça : on me proposait de travailler sur un nouveau projet, j'étais emballé alors j'acceptais et je finissais par être en retard sur tout, tout ça pour finir par laisser tomber parce que je ne pouvais pas suivre. J'ai donc préféré me consacrer aux séries en me disant que j'écrirais des comic-books pour eux plus tard. C'était une offre très gentille et j'adore un grand nombre de personnages Marvel mais, d'un point de vue de mon planning, l'occasion de pouvoir me poser et de mettre toute mon attention au service de l'écriture d'un tel comics ne s'est pas présentée. En plus, en général, quand j'ai une idée pour une histoire, elle germe et se colle dans un coin de mon esprit. Or, là, je n'ai jusqu'à maintenant pas d'idée pour leurs personnages. D'ailleurs, il semble bien, quand on lit les comics sortant actuellement, que les héros de Marvel sous en train d'évoluer et je ne vois pas quand ni sur quoi jeter mon dévolu. Ou alors, je pourrais y aller et leur demander d'écrire une mini-série sur les Fantastic Four qui tienne sur 4 numéros et qui soit un stand-alone, ou alors un stand-alone de Spider-Man parce que, là, je ne me vois pas prendre le train en marche vu les évolutions en cours. Les auteurs de ces séries ont leur propre manière de faire les choses, aussi. Et je ne voudrais pas non plus prendre la place d'un auteur récurrent juste pour en faire quatre numéros. Mais, surtout, je n'ai pas de véritable idée, pour le moment. Peut-être que si je m'asseyais à une table avec les gars de chez Marvel – que j'apprécie tous – et qu'on en discutais, j'aurais une idée mais, pour le moment, je suis trop pris par d'autres choses. Je n'ai pas officiellement refusé dans l'absolu mais j'ai décliné pour le moment car, si je devais le faire, je voudrais faire de mon mieux et pas seulement arriver comme un cheveu sur la soupe pour tenter de m'insérer dans une série en cours.
Tu lis encore, actuellement, des comic-books ?
Paul Dini : Oui.
Qu'as-tu lu de marquant, ces derniers temps ?
Paul Dini : Je lis pas mal de comics et je me fais un devoir de toujours être dans le coup de ce qui se fait. On a une boutique de comics pas loin de chez nous et j'y vais une ou deux fois par mois pour parcourir ce qui se trouve sur les rayons, j'en achète quelques uns et je les ramène à la maison ou bien je lis des comics sur Comixology, ce qui est encore plus simple : je paie et je les lis en ligne, je n'ai pas à les stocker, c'est génial. Donc j'essaie de rester à la page mais il m'arrive aussi de lire des comics marrants, qui ont une tête sympa. Parfois ce sont des comics des Simpson, des Disney, des comics indés... Mais, d'après ce que je vois, Marvel comme DC sont en train d'évoluer, d'essayer de nouvelles choses et je ne suis pas vraiment sûr que des séries qui figuraient parmi mes titres fétiches vont survivre à ce changement. Je crois qu'il va falloir attendre un petit moment pour que les choses se stabilisent. Parmi les séries que je lisais, il y avait Les Gardiens de la Galaxie ou des titres un peu en dehors du circuit comme Howard the Duck et aussi Spider-Man, de temps à autre. Je pense attendre qu'ils optent pour une direction éditoriale à laquelle il se tiendront un petit moment, ce sera alors plus simple pour moi de pouvoir les suivre.
Si tu avais la possibilité de visiter le crâne d'une personne célèbre, passée ou présente, afin de comprendre son art, ses techniques ou simplement sa vision du monde, qui choisirais-tu et pourquoi ?
Paul Dini : Walt Disney. J'aimerais bien qu'il rende visite à sa compagnie, aujourd'hui, histoire de réparer quelques trucs. [rires] Je pense qu'il aurait son mot à dire quant à la manière dont sa compagnie a été gérée depuis quelques temps. Mais j'ai toujours aimé Walt Disney. C'était quelqu'un de très créatif avec une vision assez unique alors j'aimerais assez pouvoir entrer dans sa tête et y faire un petit tour. J'aimerais aussi pouvoir me rendre dans la tête de Teddy Roosevelt, à l'aube du XXe siècle. C'était un personnage au caractère bien trempé et, vu le chemin sur lequel se trouvent les USA, aujourd'hui, il aurait aussi son mot à dire. J'ai l'impression que, depuis l'époque où il était au pouvoir, il y a 80 ou 90 ans, nombre de choses ont changé et pas forcément pour le meilleur.
Merci Paul !