Responsables réciproquement de comics à succès ces dernières années, le dessinateur Sean Murphy et le scénariste Scott Snyder n'avaient collaboré qu'une seule fois avant la sortie de The Wake. La sortie en France de cette maxi-série couronnée d'un Eisner Award a permis aux éditions Urban Comics de faire venir dans les terres angoumoises les deux auteurs au plus grand festival consacré au 9ème art dans le monde. Communicants et accessibles, les deux compères ont décrypté leur album et répondu aux nombreuses questions qui nous traversaient l'esprit lors d'un entretien des plus instructifs. The Wake, Punk Rock Jesus, Wytches, American Vampire ou Batman sont bien évidemment au rendez-vous...
interview Comics
Scott Snyder & Sean Murphy
Bonjour Sean Murphy et Scott Snyder, pouvez-vous présenter votre voisin ?Scott Snyder : Le très beau et débonnaire Sean Murphy... C'est Sean Murphy, au cas où vous ne le connaîtriez pas, même si je suis sûr que si. C'est un des illustrateurs les plus novateurs d'Amérique. Pour moi, c'est un artiste qui réussit à combiner différents styles afin d'obtenir quelque chose de complètement nouveau. Du manga au dessin traditionnel européen en passant par la narration américaine... Tout ça en un seul lot. Son dessin est basé sur le mouvement et, techniquement, surpasse tout le reste. C'est un incroyable bâtisseur d'univers et son style en fait une voix unique dans l'industrie d'aujourd'hui, et ça, c'est très difficile à réussir. C'est aussi un de mes meilleurs amis.
Sean Murphy : Je pense que Scott est un des auteurs les plus iconiques et les plus prolifiques de notre génération. En très peu de temps, il a réussi à faire certaines choses sur Batman que l'on n'avait pas vues depuis The Dark Knight. Et il a réussi à en faire autant sur ses propres titres comme American Vampire, The Wake et maintenant Wytches. C'est un plaisir de le connaitre. On emploie souvent le terme d'amitié en parlant des gens que l'on accompagne aux conventions et aux festivals mais, dans notre cas, on est vraiment amis en dehors des comics. Il est incroyable et il a changé ma vision des comics, de DC Comics... Je pense qu'on va rester amis pour encore longtemps. Et lui aussi, il est très beau.
Scott, tu as débuté comme écrivain. Comment es-tu arrivé dans l'univers des comics ?
Scott Snyder : Enfant, j'ai toujours voulu être auteur et illustrateur dans les comics. Pendant toute l'époque du lycée, j'avais un portfolio avec moi et j'ai choisi ma fac parce que celle-ci nous donnait la possibilité d'aller prendre des cours dans une école d'art située pas loin - la RISD, la Rhode Island School of Design. J'étais vraiment motivé pour devenir un auteur et dessinateur mais, à la fac, il était très difficile de rester à niveau en ce qui concernait le dessin car les cours qu'on pouvait suivre à l'école de dessin était d'un tout autre niveau de ceux de mon école. J'ai donc fini par écrire de plus en plus et j'ai fini par tomber amoureux de l'écriture. J'écrivais des nouvelles, des romans... J'étais heureux mais je pense que j'avais du mal à accepter les demandes du marché d'alors. On était alors en 2007, 2008 et l'économie américaine commençait à souffrir de la crise. Cela entraînait beaucoup de pressions, il fallait que les titres se vendent très bien, il fallait forcément vendre des best-sellers. Mon éditeur était donc inquiet du fait que le titre que je leur avais vendu et que je m'apprêtais à écrire ne se vende pas très bien. Ça parlait d'un pilote au début du XXième siècle et je crois qu'ils avaient peur que ce ne soit pas un titre qui se vende aussi bien que ce dont ils avaient besoin. J'ai alors commencé à écrire des nouvelles, pour passer le temps et pour ne pas trop penser à tout ça. Une de ces nouvelles parlait d'un super-héros et elle a fini dans une sorte d'anthologie dans laquelle plusieurs auteurs écrivaient des nouvelles sur des super-héros qu'ils avaient inventés. La plupart de ces histoires étaient comiques et parlaient de super-héros aux pouvoirs idiots, participant à des groupes de soutien ou encore un autre au nom idiot qui creusait des trous dans son jardin, des choses comme ça. Mais mon histoire était très sérieuse. DC Comics sont tombés dessus et nous ont demandés si certains d'entre nous souhaiteraient travailler pour de vrai dans les comics. J'ai répondu que oui et on m'a offert l'opportunité d'écrire quelques trucs pour Marvel et j'ai aussi pu pitcher American Vampire à la personne de DC. Il s'agissait de Mark Doyle et de Janine Schaeffer qui sont ensuite devenus mes éditeurs attitrés. Donc tout s'est plutôt bien passé pour moi. J'ai beaucoup réfléchi, ensuite, au fait que même si j'aime écrire des textes, ça ne me manque pas du tout parce que j'adore les comics, collaborer avec d'autres artistes. Je n'avais jamais réalisé combien la solitude de l'écrivain me pesait avant de commencer dans ce métier et de m'y faire des amis. La joie qu'on éprouve à réaliser une oeuvre comme The Wake ou de faire ce que l'on a fait sur American Vampire, tout cela vient du fait de travailler ensemble sur quelque chose qui prend vie, qui s'anime à mesure que l'on s'adapte l'un à l'autre. Et cette solitude de l'écriture, ça ne me manque pas du tout. Le fait de collaborer et d’échanger sans cesse avec d'autres personnes, c'est ce qui me plaît le plus dans ce média.
Sean, l'univers d'American Vampire a t-il été difficile à mettre en scène pour toi ?
Sean Murphy : Oh, c'était un plaisir et c'est ça, American Vampire. Ça vient de ce mélange d'une horreur issue des traditions et des mythes avec la véritable histoire des Etats-Unis. Et ce qui était intéressant pour nous c'était de sortir l'ensemble du territoire américain et de parler des conflits européens. Et je suis un grand amateur de faits historiques, tout comme Scott et on a eu de nombreuses conversations tournant autour de ce que l'on souhaiterait voir, quels seraient les pays à visiter, les véhicules militaires, ce genre de choses... Je pense qu'on voulait aussi en faire, par ci par là, une sorte d'ode à Indiana Jones. Parmi toutes nos collaborations, à tous les deux, ça a été une de mes préférées.
Scott, l'horreur et le fantastique ont l'air d'avoir été une grande influence chez toi...
Scott Snyder : Oui, j'ai toujours été attiré par l'horreur, même quand j'étais enfant. J'ai toujours aimé certains films d'horreur. Je me suis souvent demandé pourquoi, peut-être parce que quand on est un petit geek rondouillard, on prend son pied à regarder tous les gamins populaires se faire massacrer dans les slasher movies ? [rires] Ou bien peut-être était-ce plus profond. Mais ma première histoire d'amour avec la littérature horrifique a été Stephen King et j'aime croire que ce qui m'attire est que le genre horrifique, quand il est réussi, consiste à te mettre face-à-face avec ce qui t'effraie le plus dans le monde mais aussi en toi-même. Je trouve ça très pur. Les monstres ou les horreurs que tu affrontes ne sont que des allégories de tes cauchemars personnels, de qui tu es ou de ce que le monde va te faire subir ou encore de la nature même de la vie, quelque part. Je pense que, quand l'horreur fonctionne vraiment, on a alors la plus pure forme de conflit puisqu'on a à affronter un adversaire représentant la pire chose à laquelle on souhaite être confronté car, au final, le monstre représente la pire peur que tu puisses ressentir vis-à-vis du monde qui t'entoure. Voilà pourquoi je retourne sans cesse à l'horreur. Même quand j'écrivais des histoires dans d'autres genres : des drames, de la science-fiction ou des histoires de Batman ou de Superman, les antagonistes que je mettais face à mes héros étaient écris avec cette idée en tête, des personnages qui disaient "tout ce que tu crains sur ton compte existe et je vais te montrer pourquoi!". Voilà ce que c'est que l'horreur et, quand c'est bien fait, c'est fait d'une manière très épurée.
Sean, quel regard portes-tu sur Punk Rock Jesus à présent que tu l'as terminé ?
Sean Murphy : J'en garde un bon souvenir. Je ne l'ai pas fait pour des raisons mercantiles mais juste pour me soulager, parce qu'il fallait que ça sorte. Bizarrement, c'est sorti en hardcover en France avant même de sortir en hardcover aux États-Unis. Je suis content que ça ait aussi bien marché. On en a plus vendu ici qu'aux États-Unis mais ça c'est parce que les français aiment rire du côté religieux des américains. [rires] Je suis content qu'autant de gens l'aient adopté et je pense souvent à la manière dont j'ai joué avec la religion, en particulier avec la religion chrétienne et à ce qui s'est récemment produit ici, en France. C'est dommage qu'on puisse se permettre de rire avec certaines religions mais pas avec d'autres. Mais c'est une grande question et j'y reviendrais sûrement plus tard.
Pouvez-vous nous présenter The Wake ?
Scott Snyder : Oui, bien sûr. L'histoire de The Wake est celle d'une créature que l'on trouve au fond de l'océan par une équipe de mineurs. Elle est humanoïde, ressemblant à une sirène mais c'est une créature féroce et vicieuse. une enquête est lancée afin de savoir s'il en existe d'autres et, rapidement, l'histoire dépasse ce simple cadre. La deuxième partie de l'histoire est plutôt une aventure, avec de la science-fiction. Mais le principal sujet de The Wake, en tous cas la manière dont je le pitcherais, est l'exploration. Il s'agit de découvrir, de sortir et de franchir les limites de sa propre existence, même si ce qu'on va y découvrir sont des choses incompréhensibles, effrayantes, destructrices, magnifiques ou incroyables. Il ne faut pas avoir peur de quitter son île et d'essayer d'explorer les alentours parce qu'au final, l'univers favorise les curieux. C'est un livre irrévérencieux, qui mélange toutes les influences qu'on a pu trouver issues d’œuvres traitant de l'océan. Sean est sans doute le dessinateur qui me pose le plus de problèmes, et je le dis comme un compliment, parce que ce qu'il n'a de cesse de se surpasser et de faire des choses qu'il n'a jamais faites auparavant. Du coup, je m'efforce de suivre ce mouvement pour ce qui est de mon écriture. The Wake est en quelque sorte devenu notre terrain de jeu où chacun disait "oh il veut faire ça ? Eh bien moi je vais faire ça !" et on a voulu tenter de faire un bouquin qui soit hors du commun, déchaîné, irrévérencieux et fun tout en réussissant à le conclure sur une note émouvante... Notre but était de pouvoir dire "voilà de quoi parle le livre, sort de ta bulle et va explorer le monde". ça parle d'aventures en mer, de pirates, de science-fiction, d'exploration sous-marine, de monstres, de dauphins qui parlent... Tout ça. C'est vraiment un projet que j'ai adoré faire parce qu'à mes yeux, c'est aussi ça, être un auteur. The Wake me dit "Scott, souviens-toi toujours que tu ne dois pas avoir peur de t'essayer à des trucs a priori ridicules et vouées à l'échec". Et, travaillant avec Sean sur ce projet, je savais qu'il pourrait faire fonctionner tout ça, que j'étais entre de bonnes mains. Si je devais choisir un ou deux trucs à envoyer dans l'espace pour représenter ce que j'écris, The Wake en ferait partie.
Sean Murphy : Une capsule spatiale...
Scott Snyder : Oui.
Sean Murphy : Ou bien au fond de l'océan.
Seriez-vous partant pour réaliser une suite à The Wake ?
Scott Snyder : Oui, bien sûr. J'aimerais y retourner, écrire une nouvelle histoire mais je crois qu'en fin de compte on a tellement de projets autres que celui-ci sur lesquels on souhaiterait travailler ensemble que ça ne va pas être possible. Si une édition spéciale, genre deluxe, alors oui j'aimerais bien écrire une histoire assez courte mais pour des choses de plus grande envergure, on a tous les deux d'autres projets inédits et plus prioritaires, que ce soit chacun de son côté ou ensemble.
Sean Murphy : Pour le moment, on en a fini avec le monde sous-marin mais on a en projet une petite histoire sur le dauphin de The Wake. Donc peut-être qu'on fera plus tard une anthologie avec une histoire de cinq pages où on verra Dash chercher de la nourriture.
Imaginez-vous déjà une autre collaboration ?
Sean Murphy : Tous les deux ? Oui, mais on ne peut pas encore en parler. Je pense qu'on sait quand même déjà ce qu'on va faire ensemble, après, non ?
Scott Snyder : Oui, on sait avec quelle compagnie et avec quels personnages et on n'a plus qu'à partir de là.
Scott, as-tu imaginé un plan sur le long terme sur Batman ?
Scott Snyder : Oui, oui, j'ai quelque chose en tête. Je croyais que Endgame, le cycle sur lequel on est en ce moment, serait ma dernière histoire et je pense que ça se sent, quand on le lit. On fait ses adieux à plein de choses et ça démonte beaucoup de choses sur le plan de la mythologie pour les reconstruire autrement. Ce que j'ai réalisé, il y a un an de ça, c'est que si Greg Capullo voulait bien rester sur la série, il y avait alors moyen de tenter un truc dément, quelque chose qui serait le truc le plus étrange que l'on ait jamais tenté. J'ai donc prévu quelque chose qui devrait aller jusqu'au 50ème numéro, soit sur dix numéros post-Endgame. Ce sera une très grande histoire avec un statu-quoi inhabituel pour Gotham City. J'espère que les lecteurs apprécieront car c'est en tout cas le truc le plus bizarre qu'on ait jamais fait. Je pense qu'on va le faire à l'instinct. Je n'avais jamais prévu d'écrire aussi longtemps que je ne l'ai fait sur cette série mais on a été encouragés par les fans et j'ai toutes ces idées que je voudrais matérialiser... Donc si vous avez aimé ce qu'on a fait jusqu'à maintenant et si vous souhaitez que moi et Greg on reste, alors on va réfléchir à la question mais si j'arrive pas à trouver une histoire du même acabit que Endgame ou de celle qui va suivre, alors je partirai. Je ne veux pas être sur Batman pour écrire des petites enquêtes ou juste histoire d'être sur Batman, je veux y être pour raconter des histoires qui me soient chères. Sinon, autant laisser quelqu'un d'autre le faire ; il y a plein de gens, là-dehors, qui ont des bonnes histoires de Batman à raconter, celles qu'ils aimeraient voir réalisées s'ils pouvaient devenir auteur sur Batman. Et je me sentirais mal d'empêcher ces gens de raconter leurs histoires en restant sur la série. Mais il m'en reste encore au moins une de bien.
Scott, peux-tu nous parler de Batman Eternal ?
Scott Snyder : Eh bien Batman Eternal paraît chaque semaine, je ne sais pas si ce sera le cas ici mais chez nous il en sort quatre numéros par mois. C'est une série monstrueuse et la raison pour laquelle on l'a fait c'est que DC voulait un titre hebdomadaire. J'ai répondu non au départ puis j'ai pensé à une histoire dont j'avais parlé avec mon ami James Tynion. On s'était alors dit "si on fait ça, ça changerait beaucoup de choses dans la continuité. Mais ça demanderait un tel nombres de numéros, pas sûr qu'avec 52 on y arriverait". Mais une fois qu'on a eu cette histoire, on a réalisé que ce serait fun. Mais l'idée de Batman Eternal, c'est d'aller visiter tous les personnages possibles et imaginables de la mythologie et de voir Gotham City évoluer. C'est notre version de la gazette de Gotham. Si tu veux savoir comment Catwoman devient un boss du crime, comment Bruce Wayne perd toute sa fortune ou pourquoi - je ne veux rien spoiler - le commissaire Gordon change sans cesse de status, c'est Batman Eternal qu'il faut lire. Tout ce qui se produit à Gotham se trouve dans Batman Eternal et beaucoup de séries qui ont été lancées aux Etats-unis, comme Arkham Manor, Gotham by Midnight, la nouvelle série Catwoman... Toutes ces séries sont des spin-offs d'Eternal. C'est la série mère, celle dans laquelle on apporte des modifications à la ville de Gotham, des modifications qui se répercutent dans les autres séries. J'espère que j'ai été compréhensible.
Quels sont vos prochains projets ?
Sean Murphy : En ce moment je travaille avec Mark Millar sur Chrononauts, qui sort en mars, aux Etats-Unis. Et après ça, je vais travailler avec Rick Remender sur Tokyo Ghost. Les deux seront chez Image Comics. Ces deux projets vont m'accaparer pour la majeure partie de 2015 mais j'espère pouvoir me libérer pour revenir ici. Sûrement avec l'aide de mes amis d'Urban... Scott ?
Scott Snyder : Je travaille sur Batman, jusqu'au 50ème numéro. Mais aussi sur American Vampire. On est repartis vraiment très fort donc je suis très enthousiaste et après on attaque la conquête de l'espace avec les années soixante, ça va être American Vampire in Space, une chose que je m'étais juré de ne jamais faire mais bon, on va la faire. Je fais aussi Wytches, avec Jock, chez Image et ça m'amuse beaucoup. Le premier arc est sur le point de se conclure, aux États-Unis. Et en automne prochain, je travaille avec Jeff Lemire, chez Image. Un graphic novel intitulé After Death - A. D. - et où on imagine un monde où on a - pour faire simple- "guéri la mort". C'est un gros récit de science-fiction mais c'est aussi la première fois que j'ai l'opportunité de travailler sur un graphic-novel et pas une série, ce qui est très excitant. Et après ça, je vais essayer de faire quelque chose avec ce mec...
Scott, peux-tu nous en dire plus sur Wytches ?
Scott Snyder : Oh oui, Wytches est, à mes yeux, le titre le plus sombre que j'ai écrit. Le sujet est le suivant : et si tout ce qu'on croyait savoir sur les sorcières était faux ? On les imagines telles des adeptes du diable, des femmes laides, à la peau verte alors que ce sont des créatures primales, cannibales, vivant au fond des bois. Leur société emploie cette science, séculaire, très primitive mais très puissante. Elles peuvent mélanger du sang et des os, tout ça, dans leur antre, au fond des bois, pour créer des potions et des poudres pouvant guérir le cancer, prolonger la vie ou faire tomber les gens amoureux. Tout ce dont la médecine moderne est incapable. Mais, en échange, il faut leur donner une personne à manger. Il faut leur prêter allégeance et, pour ça, mettre une marque sur la personne que l'on souhaite leur donner en pâture afin que les sorcières viennent s'en emparer. Et Jock réussit parfaitement à illustrer ces terrifiantes créatures souterraines que sont les sorcières. Mais ce qui est important, pour moi, et c'est en lien avec ce que je disais sur l'horreur un peu plus tôt, c'est que les sorcières ne viennent te chercher que si quelqu'un t'a "donné". ça parle donc du côté obscur de l'humanité, des choses que l'on désire sans l'admettre. On désire un partenaire qui ne veut pas de nous, mais peut-être que si on donne une personne aux sorcières, alors celles-ci vont nous donner quelque chose altérant les facultés de la personne qu'on désire et qu'elle va nous aimer, pour toujours, comme un esclave. Si on est en train de mourir mais qu'on leur donne un enfant que l'on ne connait pas, alors elles vont nous donner quelque chose nous permettant de vivre encore cinquante ans. Rien n'est magique, c'est de la science, mais en fin de compte le livre me tient à cœur parce qu'il traite de ces choses tordues qu'on ne veut pas admettre mais pour lesquelles on est prêt à sacrifier d’autres personnes. J'en suis très fier et, heureusement, ça marche bien aux États-Unis, ce qui a été une bonne surprise pour Jock et pour moi. On en est très reconnaissant et on espère que vous allez aimer Wytches.
Quelles sont vos lectures du moment ?
Sean Murphy : J'essaie de suivre tout ce que font mes amis donc Batman, Wytches, ce que fait Matteo [Scalera], le Saga de Fiona Staples... Tout ça figure parmi mes favoris. C'est assez ironique mais la plupart des titres que j'apprécie sont "French-friendly", des choses que vous apprécieriez, des histoires d'aventure et assez peu de super-héros, à l'exception de Batman. Je crois que j'ai beaucoup de points communs avec vous.
Scott Snyder : Je ne lis que ce que j'écris. Non, mais il y a tellement de bons titres, en ce moment. Il y beaucoup de titres de super-héros que j'aime bien comme le Spider-Man de Dan Slott, le Thor de Jason Aaron... Mais en général, je lis surtout des bouquins indépendants. Lazarus est ma série préférée du moment, avec Greg Rucka et Michael Lark. Saga. Southern Bastards, aussi, encore de Jason Aaron. Image Comics n'arrête pas ! Je suis aussi très emballé par le titre de Ray Fawkes, Intersect et Ray est aussi un ami. Descender de Jeff Lemire, aussi. C'est vraiment un grand moment et il y a un nombre de très bons titres qu'on n'a pas vu depuis très longtemps.
Si vous aviez le pouvoir de visiter le crâne d'un autre artiste pour en comprendre son génie, qui choisiriez-vous ?
Sean Murphy : Ah... Rendre visite à un artiste et lui poser des questions sur sa technique... Je pense que l'évidence serait de répondre Léonard de Vinci mais je dirais plutôt... Bill Watterson. Pour lui demander pourquoi il s'est arrêté. [rires] Je sais qu'il est ici donc peut-être que j'en aurait l'opportunité.
Scott Snyder : Bien joué ! C'est difficile car je dois choisir entre dessinateur et auteur ! J'adorerais rencontrer Alan Moore et discuter de son œuvre avec lui. Et Frank Miller m'a beaucoup influencé mais j'ai eu la chance de faire sa connaissance, depuis quelques années, donc j'ai déjà pu discuter avec lui. Mais j'aimerais cependant pour voir retourner dans le temps et discuter avec lui à l’époque où il écrivait The Dark Knight Returns. Alors qu'il n'avait pas encore écrit Year One, et discuter de tout ça. J'aimerais savoir ce qu'il pensait à l'époque.
Sean Murphy : Ça aussi, c'est une bonne réponse !
Scott, certaines rumeurs laissaient entendre que tu allais collaborer avec Frank Miller sur un éventuel Batman. Est-ce vrai ?
Scott Murphy : Aaaah ! Euuuuh! Je ne peux pas vraiment en parler parce que... J'ai eu la chance de devenir ami avec Frank au cours des dernières années et je suis un grand fan de son travail et je ne peux pas en parler parce qu'à l'heure actuelle, on ne sait pas si ça va pouvoir se faire. J'adorerais pouvoir travailler avec lui, je suis un très grand fan, mais je pense qu'on va devoir attendre et voir ce qui va se passer. Je ne peux pas vraiment en parler, désolé.
Merci messieurs !
Remerciements à Alain Delaplace pour la traduction, à Louise Rossignol et Clémentine Guimontheil pour l'organisation de cette rencontre.