L'histoire :
Dans la petite bourgade de pêcheurs de Mupansen, sorte de bidonville posé sur un canal de drainage des égouts, le jeune Ya San vit seul avec son père. Dans leur cahute en bois, Ya San s’est aménagé un coin à l’aide d’une vieille barque en chêne où il aime passer du temps à lire les quelques bandes dessinées que lui ramène parfois son père après la paye. Les gens racontent que le grand-père du jeune homme disparut en mer et que les pêcheurs qui retrouvèrent son embarcation, remplie de drôles d’insectes qu’on dit engendrés par des fantômes, périrent tous des suites d’une étrange maladie. On dit aussi que la mère du garçon l’avait abandonné à la naissance et que son père actuel l’avait alors repêché dans les égouts. Un jour, une jeune fille du village est retrouvée morte dans le canal un peu avant que Ya San ne soit victime pour la seconde fois d’une maladie d’enfance le laissant léthargique et craignant la lumière pendant quelques temps. Après les funérailles de la jeune fille, un nouveau mort est retrouvé et la rumeur selon laquelle le village serait victime d’une malédiction commence alors à circuler auprès des habitants de Mupansen. Aux yeux de son père, Ya San commence alors à avoir un comportement étrange et se met à réparer la barque qui lui servait d’abris…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Comme le dit le scénariste français Corbeyran (Le Chant de stryges) dans le bandeau de couverture qui contient son interview, cette œuvre s’écarte des chemins balisés, c’est le moins que l’on puisse dire. Fortement encrée dans le fantastique, Ya San est en effet une sorte d’OVNI dont on ne peut comprendre toute la subtilité qu’à la seconde lecture. Car l’œuvre est jalonnée de nombreux mysticismes et, de plus, mélange allégrement le passé, le présent et les points de vue de différents personnages, à tel point qu’il n’est possible de saisir la cohérence de l’histoire qu’à la fin du volume. Si cela est fait exprès pour faire perdre au lecteur ses points de repères et le noyer dans l’ambiance étrange, il n’en est pas moins vrai que l’histoire est souvent un peu décousue et se perd aussi parfois dans des détails pas toujours nécessaires et qui ne sont là que pour ajouter au background. Un scénario qui ne sera pas accessible à tous donc, et servi par des graphismes assez inhabituels. Maîtrisant le style crayonné, l’auteur a réalisé entièrement ses pages de cette manière, sans tramage ni encrage. Cela donne lieu à de très belles planches comme à certaines assez mal finies où se voient encore de nombreuses traces de travail. L’auteur multiplie aussi les plans décalés et inquiétants et soigne particulièrement sa mise en scène. Notons au passage, que nous devrions retrouver prochainement ce dernier auprès de Jean-David Morvan (Sillage) pour une toute nouvelle série. Au final, voilà un ouvrage qui saura plaire à certains et que d’autres détesterons. Un avis mitigé donc.